L’avis d’expulsion est en cours de rédaction et sera disponible en quatre langues

Source : reseauinternational.net – 25 novembre 2023 – Pepe Escobar

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Le christianisme orthodoxe, l’islam modéré et plusieurs courants du taoïsme/confucianisme pourraient devenir les trois principales civilisations d’une humanité purifiée.

L’avis d’expulsion est en cours de rédaction. Il sera rédigé en quatre langues. Le russe. Le farsi. Le mandarin. Et enfin, l’anglais.

L’un des plaisirs les plus chers de l’écriture professionnelle est d’être toujours enrichi par des lecteurs informés. Cette idée d’«expulsion» – qui vaut mille traités de géopolitique – m’a été offerte par l’un de mes lecteurs les plus perspicaces, commentant une chronique.

En bref, ce que nous avons ici exprime un consensus profondément ressenti à travers le spectre, non seulement en Asie occidentale, mais aussi sous la plupart des latitudes à travers le Sud mondial/Majorité mondiale.

L’impensable, sous la forme d’un génocide mené en direct et en temps réel sur tous les smartphones au cours de la troisième décennie du millénaire – que j’ai appelée les «Années folles» dans un livre précédent – a agi comme un accélérateur de particules, concentrant les cœurs et les esprits.

Ceux qui ont choisi d’embraser le Moyen-Orient sont déjà confrontés à de méchants contrecoups. Et cela va bien au-delà de la diplomatie exercée par les dirigeants du Sud mondial.

Pour la première fois depuis des lustres, par l’intermédiaire du président Xi Jinping, la Chine a été plus qu’explicite sur le plan géopolitique (un véritable souverain ne peut pas se taire lorsqu’il s’agit de génocide). La position sans équivoque de la Chine sur la Palestine va bien au-delà de la routine géoéconomique de la promotion des corridors de commerce et de transport de la BRI.

Tout cela alors que le président Poutine a défini l’envoi d’aide humanitaire à Gaza comme un «devoir sacré», ce qui, dans le code russe, inclut, de manière cruciale, le spectre militaire.

Malgré toutes les manœuvres et les prises de position occasionnelles, tout le monde sait que l’accord actuel de l’ONU est irrémédiablement pourri et totalement impuissant lorsqu’il s’agit d’imposer des négociations de paix significatives, des sanctions ou des enquêtes sur des crimes de guerre en série.

La nouvelle ONU en gestation est le BRICS 11 – en fait le BRICS 10, considérant que le nouveau cheval de Troie qu’est l’Argentine pourrait en pratique être relégué à un rôle marginal, en supposant qu’elle rejoigne l’organisation le 1er janvier 2024.

Les BRICS 10, menés par la Russie et la Chine, tous deux régis par un solide sens moral, gardent leurs oreilles sur le terrain et écoutent la rue arabe et les terres d’islam. En particulier leurs peuples, bien plus que leurs élites. Ce sera un élément essentiel en 2024 lors de la présidence russe des BRICS.

Même sans check out, il faudra partir

L’ordre du jour actuel du Nouveau Grand Jeu est d’organiser l’expulsion de l’Hégémon du Moyen-Orient – un défi aussi bien technique que civilisationnel.

Dans l’état actuel des choses, le continuum Washington-Tel Aviv est déjà prisonnier de son propre dispositif. Ce n’est pas l’Hôtel California ; vous ne pouvez pas partir quand vous le souhaitez, mais vous serez forcés de partir.

Cela peut se faire de manière relativement douce – pensez à Kaboul comme à un remix de Saigon – ou, si les choses se précipitent, cela peut impliquer un Apocalypse Now naval, avec des baignoires en fer coûteuses transformées en récifs coralliens sous-marins et la disparition du CENTCOM et de sa projection AFRICOM.

Le vecteur crucial depuis le début est la façon dont l’Iran – et la Russie – ont joué, année après année, avec une patience infinie, la stratégie maîtresse conçue par le général Soleimani, dont l’assassinat a en fait déclenché les Années folles.

Un hégémon désarmé ne peut vaincre le «nouvel axe du mal», Russie-Iran-Chine, non seulement au Moyen-Orient, mais aussi partout en Eurasie, dans la région Asie-Pacifique et dans toute l’Afrique. La participation directe/normalisation du génocide n’a fait qu’accélérer l’exclusion progressive et inévitable de l’Hégémon de la plupart des pays du Sud mondial.

Tout cela pendant que la Russie travaille méticuleusement à l’intégration de la mer Noire, de la mer Caspienne, de la mer Baltique (malgré l’hystérie finlandaise), de l’Arctique et de la mer du Pacifique Nord-Ouest, et que la Chine accélère l’intégration de la mer de Chine méridionale.

Xi et Poutine sont des joueurs d’échecs et de go doués – et profitent de conseillers stellaires du calibre de Patrouchev et de Wang Yi. Le jeu de go géopolitique de la Chine est un exercice de non-confrontation : tout ce qu’il faut faire, c’est bloquer la capacité de mouvement de l’adversaire.

Les échecs et le go, en tandem diplomatique, représentent un jeu où l’on n’interrompt pas l’adversaire lorsqu’il se tire plusieurs fois dans les pattes. En prime, l’adversaire se met à dos plus de 90% de la population mondiale.

Tout cela conduira à l’effondrement de l’économie de l’Hégémon. Il pourra alors être battu par défaut.

Les «valeurs» occidentales enterrées sous les décombres

Alors que la Russie, notamment via les efforts de Lavrov, propose au Sud mondial/Majorité mondiale un projet civilisationnel, axé sur une multipolarité mutuellement respectueuse, la Chine, via Xi Jinping, offre la notion de «communauté avec un avenir partagé» et un ensemble d’initiatives, discutées en long et en large lors du Forum de l’Initiative Ceinture et Route (BRI) à Pékin en octobre, où la Russie, et ce n’est pas un hasard, était l’invitée d’honneur.

Un groupe d’universitaires chinois présente l’approche de manière concise : la Chine «crée/facilite des nœuds mondiaux de relation/communication et des plateformes de collaboration concrète/échanges pratiques». Les participants restent souverains, contribuent à l’effort commun (ou simplement à des projets spécifiques) et reçoivent des avantages qui les incitent à continuer.

C’est comme si Pékin agissait comme une sorte d’étoile brillante et de guide.

Par contraste, ce qui reste de la civilisation occidentale – qui n’a certainement pas grand-chose à voir avec Montaigne, Pic de la Mirandole ou Schopenhauer – plonge de plus en plus dans un Cœur des ténèbres auto-construit (sans la grandeur littéraire de Conrad), affrontant le vrai visage, irrémédiablement horrifiant, de l’individualisme conformiste et soumis.

Bienvenue dans le nouveau médiévalisme, précipité par les «applications mortelles» du racisme occidental, comme l’explique l’universitaire Shuchen Xiang, professeur de philosophie à l’université de Xidan, dans son brillant ouvrage intitulé «Le cosmopolitisme chinois».

Les «applications mortelles» du racisme occidental, écrit le professeur Xiang, sont la peur du changement, l’ontologie du dualisme bivalent, l’invention du «barbare» en tant qu’Autre racial, la métaphysique du colonialisme et la nature insatiable de cette psychologie raciste. Toutes ces «applications» sont en train d’exploser, en temps réel, au Moyen-Orient. La principale conséquence est que la construction des «valeurs» occidentales a déjà péri, ensevelie sous les décombres de Gaza.

Maintenant, une lueur d’espoir : on peut soutenir – et nous y reviendrons – que le christianisme orthodoxe, l’islam modéré et plusieurs courants du taoïsme/confucianisme peuvent embrasser l’avenir comme les trois principales civilisations d’une humanité purifiée.