Balzac et la première rébellion féministe des femmes – Nicolas Bonnal

Par Nicolas Bonnal

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Né en 1961 à Tunis, Nicolas Bonnal étudie beaucoup, voyage plus encore et commence à publier en 1995 : Mitterrand le grand initié. Il publie ensuite aux belles lettres le Coq hérétique sur l’exception française, la première étude en français sur Tolkien et Internet novelle voie initiatique. Il publie aussi des romans (les territoires protocolaires) et un recueil de contes (les mirages de Huaraz) après une vacance de cinq ans en Amérique du sud. Il revient vivre en Andalousie, puis publie des livres sur le cinéma (le paganisme, Kubrick, Ridley Scott, sans oublier les westerns). Anarchiste réactionnaire,  proche des libertariens américains et des traditionalistes européens, Nicolas Bonnal  se réclame aussi du genre pamphlétaire (un livre sur Céline) et décidément antimoderne. Il a publié des textes sur une dizaine de sites dont France-courtoise.info, bvoltaire.fr, dedefensa.org, fr.sputniknews.com et pravdareport.com. Plusieurs de ses livres ont été traduits (russe, brésilien, ukrainien, espagnol). Son blog : nicolasbonnal.worpress.com

Illustration : Le printemps, d’Edouard Manet 1881

La Femme de trente ans… Ce roman lance le bovarysme psychologique et sociétal. Mais Julie est
beaucoup moins passive qu’Emma et elle se rebelle intellectuellement contre les hommes… Et
déboulonne la société, annonçant nos législations folles d’aujourd’hui (on n’en fait pas un drame :
après tout, qu’elle dégage, l’espèce dite humaine) :
– Obéir à la société ?… reprit la marquise en laissant échapper un geste d’horreur. Hé ! monsieur,
tous nos maux viennent de là. Dieu n’a pas fait une seule loi de malheur ; mais en se réunissant les
hommes ont faussé son œuvre. Nous sommes, nous femmes, plus maltraitées par la civilisation que
nous ne le serions par la nature. La nature nous impose des peines physiques que vous n’avez pas
adoucies, et la civilisation a développé des sentiments que vous trompez incessamment. La nature
étouffe les êtres faibles, vous les condamnez à vivre pour les livrer à un constant malheur. Le
mariage, institution sur laquelle s’appuie aujourd’hui la société, nous en fait sentir à nous seules tout
le poids : pour l’homme la liberté, pour la femme des devoirs. Nous vous devons toute notre vie,
vous ne nous devez de la vôtre que de rares instants. »
Makow rappelait que pour les féministes le sort des femmes dans la société machiste c’est
Auschwitz. ! Notre sacré Balzac (pas son personnage)  n’en est pas loin non plus :
« Hé bien, le mariage, tel qu’il se pratique aujourd’hui, me semble être une prostitution légale. De là
sont nées mes souffrances… »
Pour notre bon gros romancier réaliste (réaliste ou romantique ?), la vie de la femme devient un
cercle des horreurs dantesques :
« Mon avenir est horrible, je le sais : la femme n’est rien sans l’amour, la beauté n’est rien sans le
plaisir ; mais le monde ne réprouverait-il pas mon bonheur s’il se présentait encore à moi ? Je dois à
ma fille une mère honorée. Ah ! je suis jetée dans un cercle de fer d’où je ne puis sortir sans
ignominie. Les devoirs de famille accomplis sans récompense m’ennuieront ; je maudirai la vie ; mais
ma fille aura du moins un beau semblant de mère. Je lui rendrai des trésors de vertu pour remplacer
les trésors d’affection dont je l’aurai frustrée. Je ne désire même pas vivre pour goûter les
jouissances que donne aux mères le bonheur de leurs enfants.
Je ne crois pas au bonheur. »
Cerise sur le gâteau : 
« Vous honnissez de pauvres créatures qui se vendent pour quelques écus à un homme qui passe, la
faim et le besoin absolvent ces unions éphémères ; tandis que la société tolère, encourage l’union
immédiate bien autrement horrible d’une jeune fille candide et d’un homme qu’elle n’a pas vu trois
mois durant ; elle est vendue pour toute sa vie. Il est vrai que le prix est élevé ! Si en ne lui
permettant aucune compensation à ses douleurs vous l’honoriez ; mais non, le monde calomnie les
plus vertueuses d’entre nous ! Telle est notre destinée, vue sous ses deux faces : une prostitution
publique et la honte, une prostitution secrète et le malheur. Quant aux pauvres filles sans dot, elles
deviennent folles, elles meurent ; pour elles aucune pitié !
La beauté, les vertus ne sont pas des valeurs dans votre bazar humain et vous nommez Société ce
repaire d’égoïsme. »
Et ces braves gens n’avaient rien vu.

Le pauvre curé répond à Julie :
– Madame, vos discours me prouvent que ni l’esprit de famille ni l’esprit religieux ne vous touchent,
aussi n’hésiterez-vous pas entre l’égoïsme social qui vous blesse et l’égoïsme de la créature qui vous
fera souhaiter des jouissances…
– La famille, monsieur, existe-t-elle ? Je nie la famille dans une société qui, à la mort du père ou de la
mère partage les biens et dit à chacun d’aller de son côté. La famille est une association temporaire
et fortuite que dissout promptement la mort. »
Balzac tape ensuite sur le désastreux bilan napoléonien des réformes du droit civil :
« Nos lois ont brisé les maisons, les héritages, la pérennité des exemples et des traditions. Je ne vois
que décombres autour de moi. »
Le curé est excellent (ah, si nos bons prêtres pouvaient parler comme ceux de Stendhal, de Balzac ou
même de Pagnol) :
– Madame, vous ne reviendrez à Dieu que quand sa main s’appesantira sur vous, et je souhaite que
vous ayez assez de temps pour faire votre paix avec lui. Vous cherchez vos consolations en baissant
les yeux sur la terre au lieu de les lever vers les cieux. Le philosophisme et l’intérêt personnel ont
attaqué votre cœur ; vous êtes sourde à la voix de la religion comme le sont les enfants de ce siècle
sans croyance ! Les plaisirs du monde n’engendrent que des souffrances. »
Et ici le prêtre enfonce très bien le clou.
«Vous allez changer de douleurs voilà tout. »
C’est le fardeau de la personnalité qui va apparaître, dont parlera plus tard Pearson, et dont se
moquera Nietzsche dans son Zarathoustra. Debord évoquera ce conglomérat de solitudes sans
illusions que nous sommes devenus. Tout cela se termine par une destruction – destruction ou
anéantissement ? – de la démographie européenne qui aujourd’hui s’exporte au reste du monde,
Amériques, Asie; Afrique exclue bien entendue
 
Sources 
Balzac – La femme de trente ans, ebooksgratuits.com, pp. 96-102-103
Nicolas Bonnal – Chroniques sur la fin de l’histoire (I, II et III), Amazon.fr

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