Le choc idéologique mondial

Le choc idéologique mondial

Lorsqu’on traverse les couches apparentes des conflits et oppositions de la géopolitique mondiale, c’est-à-dire, au-delà des questions territoriales, économiques ou encore géo-énergétiques, l’on découvre une confrontation d’une tout autre nature… Que j’ai appelé « choc idéologique mondial ».

En d’autres termes, une guerre menée contre l’humanité par le monde anglo-américain judéo-wahhabo-protestant ; un ensemble géopolitique sous pilotage israélo-américain rassemblant les pays de l’OTAN et les pétromonarchies d’obédience wahhabite.

Leur point commun : tous partagent la même idéologie inégalitaire, matérialiste et libérale, une vision du monde enracinée dans la Bible hébraïque[1] et déterminée par celle-ci.

Géopolitique du judéo-sionisme

Pour justifier ses guerres, cet ensemble impérial s’est appuyé sur une stratégie géopolitique rabbinique et messianique, élaborée au Moyen-Âge, et visant à entraîner les mondes chrétien et musulman dans une guerre mutuellement destructrice, en vue du rétablissement du Royaume d’Israël.

Une stratégie qui est fondée elle-même sur une lecture et une interprétation biblique, à commencer par celle du grand rabbin Eliezer ben Hourcanos au Ier siècle (Rabbi Eliezer, Les Chapitres, chapitre 28, Éditions Verdier). D’après lui, et les rabbins qui lui succéderont, le règne d’Israël n’adviendra qu’après la destruction d’Edom (l’Europe chrétienne) et la destruction des Ismaélites, les Arabes (par extension le monde musulman), descendants d’Ismaël[2].

Dans le livre le plus important de la tradition mystique juive, le Zohar, rédigé au XIIIe siècle, il est expliqué que les chrétiens et les musulmans s’entredétruiront à la fin des temps, et ce au profit d’Israël :

« Les fils d’Ismaël (les musulmans) domineront la terre sainte pendant longtemps alors qu’elle sera vide, de même que leur circoncision est vide et imparfaite. Ils empêcheront les fils d’Israël d’y retourner jusqu’à ce que s’épuise ce mérite des fils d’Ismaël. Les fils d’Ismaël provoqueront de dures guerres dans le monde et les fils d’Edom (le monde occidental) se rassembleront contre eux pour les combattre.Ils feront contre eux une bataille sur la mer, une sur la terre et une autre proche de Jérusalem. Les uns auront la maîtrise des autres. Néanmoins, la terre sainte ne sera pas conquise par les fils d’Edom. » (Zohar, parachat Vaéra, p. 32A.)

Cette prophétie auto-réalisatrice ressemble étrangement au combat qui opposa, durant la Première Guerre mondiale, la Grande-Bretagne à l’Empire ottoman, et à l’issue duquel ce dernier perdit le contrôle de la Palestine où un Foyer national juif vit alors le jour sous mandat britannique.

Déjà au XVIe siècle, deux rabbins kabbalistes, David Reuveni et Solomon Molcho, tentèrent de mettre en œuvre ce projet géopolitique messianique. David Reuveni, entre 1525 et 1532, s’adressa successivement au roi du Portugal Jean III – puis, accompagné de son élève Solomon Molcho – au pape Clément VII et à l’Empereur du Saint-Empire romain germanique Charles Quint, pour les envoyer dans une guerre contre l’Empire ottoman, les chasser de Palestine et refonder le Royaume d’Israël[3].


Ce fut la première tentative d’application de la stratégie du choc des civilisations, qui doit conduire à la promesse d’établissement d’un Grand Israël, du Nil à l’Euphrate[4].

Cette stratégie a été actualisée, laïcisée et baptisée « Choc des civilisations » en 1957 par l’historien juif britannique Bernard Lewis, qui a également joué un rôle important dans le déclenchement de la guerre d’Irak de 2003 en persuadant l’ancien vice-président des Etats-Unis Dick Cheney de se prononcer en faveur de cette guerre[5].

Ce projet religieux, messianique et politique, fallacieusement érigé en théorie scientifique, a amalgamé successivement le judaïsme et le christianisme, le protestantisme et le catholicisme, l’Europe continentale et le monde anglo-américain, pour opposer l’Occident au monde musulman, à la Russie et à la Chine.

Une autre lecture du choc des civilisations : modernisme contre tradition

Si l’on étudie, sous l’angle de l’histoire des civilisations, l’époque contemporaine, à savoir les XIXe et XXe siècles, l’on peut effectivement parler d’un choc des civilisations, mais non pas entre les civilisations chrétienne et musulmane ; il s’agit d’un choc entre modernisme et tradition, le modernisme étant représenté et mené par l’Occident avec à sa tête avant-gardiste d’abord l’Empire britannique puis les États-Unis.

Il est très important de bien distinguer l’Europe et l’Occident. L’Occident est une construction liée à cette fabrication idéologique qu’est le judéo-christianisme, et qui renvoie bien plus au monde anglo-saxon thalassocratique qu’au continent européen[6]. Ce que l’on appelle aujourd’hui « l’Occident » n’est pas seulement une construction idéologique, mais politique, à savoir l’Union européenne et son pendant géostratégique, le bras armé des États-Unis, l’OTAN. Cet Occident a le visage du monde anglo-saxon qui a connu une expansion économique et géopolitique poussée en avant par un messianisme vétérotestamentaire, lequel a accompagné et a suivi la révolution d’Oliver Cromwell (1599-1658)[7].

Le monde occidental est donc cet ensemble idéologique, politique et géopolitique qui a absorbé peu à peu l’Ancien monde catholique, gréco-latin, mais aussi germanique, et qui, au tournant du XXe siècle, ne peut déjà plus être qualifié de chrétien, tant le modernisme matérialiste et les révolutions issues de la matrice du messianisme athéiste[8] qui l’ont promu, l’ont envahi et progressivement désagrégé.

Celui qui a, le premier, identifié la manifestation géopolitique de la confrontation entre tradition et modernisme[9], laquelle est toujours d’actualité, est l’historien britannique Arnold J. Toynbee (1889-1975), théoricien de l’histoire sur la longue durée et de la civilisation. A. J. Toynbee est par ailleurs à l’origine de l’expression « Choc des civilisations », qui a été reprise et dont le concept qu’elle recouvrait a été perverti par Bernard Lewis.
Or, pour A. J. Toynbee, le choc des civilisations n’oppose pas chrétienté et islam, mais la civilisation moderne aux civilisations traditionnelles. Ainsi, en 1947, l’historien de la civilisation livrait une interprétation originale du colonialisme occidental de la première moitié du XXe siècle :

« Cette attaque concentrique lancée par l’Occident moderne contre le monde de l’Islam a inauguré le présent conflit entre les deux civilisations. On verra qu’il participe d’un mouvement encore plus vaste et plus ambitieux par lequel la civilisation occidentale ne vise rien moins qu’à l’incorporation de toute l’humanité en une grande société unique, et au contrôle de tout ce que, sur terre, sur mer et dans l’air, l’humanité peut exploiter grâce à la technique occidentale moderne. Ce que l’Occident est en train de faire à l’Islam, il le fait en même temps aux autres civilisations survivantes — chrétiens orthodoxes, indiens, monde extrême-oriental — et aux sociétés primitives survivantes qui sont actuellement aux abois, même dans leurs ultimes réduits d’Afrique tropicale. »[10]

Ce mouvement d’incorporation de l’humanité tout entière en une grande société unique s’accompagne d’un autre mouvement visant à intégrer toutes les religions traditionnelles pour les soumettre à une seule dans le cadre de cette ONU des religions qu’est le Congrès mondial des religions (Congress Of The Leaders of World and Traditional Religions)[11]. Ce processus de subversion, de décomposition et de soumission du christianisme et de l’islam a débuté aux XVIIe et XVIIIe siècles[12]. Processus parvenu au XXIe siècle dans sa phase finale ; en témoigne la déclaration, en 2012, du représentant alors du judaïsme au Congrès mondial des religions, le rabbin ashkénaze d’Israël Yona Metsger : « Mon rêve est de construire quelque chose de similaire à ce que sont les Nations Unies pour les diplomates, il s’agirait d’unifier les religieux, les dignitaires de chaque nation, de chaque pays, y compris ceux qui n’ont pas de relation diplomatique. »[13]

En somme, le choc, entre modernisme et tradition, ou en d’autres termes, entre globalisme messianique et nation, est déguisé en affrontement religieux islamo-chrétien, dans l’objectif non avoué de détruire ce qu’il reste de chrétienté et d’islam pour dissoudre ces deux civilisations et religions dans une postmodernité qui doit être redéfinie.

Domination de la chrétienté : une lecture biblique et eschatologique

Le préalable à ce triomphe d’ordre eschatologique fut la domination de l’Occident chrétien par les tenants du judaïsme.

Comprendre le rapport des juifs aux Européens et le rapport du judaïsme au christianisme à l’époque contemporaine nécessite d’avoir connaissance de la nature des rapports de Jacob et de son frère Esaü dans la Torah. Car la Bible hébraïque est le fondement de la praxéologie judaïque dans tous les domaines, de même qu’elle inspire jusqu’à la vision historique et géopolitique développée par les rabbins et les intellectuels laïques juifs à leur suite.

Si Esaü est le frère aîné de Jacob, ce sont en fait des jumeaux, mais Esaü a vu le jour le premier. Il est écrit dans la Torah qu’avant leur naissance, Dieu, s’adressant à l’épouse d’Isaac, la mère d’Esaü et Jacob, lui annonça que deux nations seront issues d’elle :

« Le Seigneur lui dit : Deux nations sont dans ton sein, et deux peuples sortiront de tes entrailles ; un peuple sera plus puissant que l’autre, et l’aîné obéira au plus jeune. » (Genèse, 25:23)

Selon la Torah, le peuple d’Edom – que les rabbins identifient à l’Europe – est destiné à obéir au peuple de Jacob, le peuple juif, Israël.

C’est bien cette promesse que tentèrent d’accomplir au XVIe siècle David Reuveni et Solomon Molcho.

Comme l’écrivait le grand historien du judaïsme Gershom Scholem (1897-1982) : « Les visions et les discours de Solomon Molcho mêlaient kabbale et incitation à une action politique à visées messianiques, parmi les chrétiens. Son martyre (1532) le fit compter par la communauté juive comme l’un des « saints » de la kabbale. Les mouvements apocalyptiques virent dans l’avènement de Martin Luther un nouveau présage, un signe de l’effondrement de l’Église et de l’approche de la fin des temps. »[14]

Solomon Molcho s’attacha à attirer l’attention des prêtres chrétiens, ce qu’il réussit très habilement ; les clercs vinrent écouter ses discours, grâce à son charisme et à ses visions, lesquelles impressionnaient ses auditoires (il prédit par exemple l’inondation de Rome en 1530 et le tremblement de terre au Portugal en 1531).

Il annonçait dans certains de ses discours la chute de Rome (qui incarne Edom) et du christianisme, ainsi que la reconstruction de la Judée. Par l’intermédiaire de son maître David Reuveni, Molcho put se rapprocher des cardinaux (à commencer par le cardinal Giulio) à Rome et rencontrer le pape Clément VII qu’il tenta de convaincre que la rédemption du peuple juif était imminente. Il réussit à impressionner le pape, au point qu’il lui accorda une approbation écrite l’autorisant à prêcher devant un public chrétien et à publier ses textes (à condition qu’ils ne soient pas antichrétiens).

Alors que Molcho posait les premières pierres de l’alliance judéo-chrétienne, l’Inquisition et l’empereur Charles Quint y ont mis un terme en envoyant Molcho au bûcher et son maître Reuveni dans un cachot.

C’est au siècle suivant que s’établira définitivement l’alliance judéo-chrétienne, plus précisément entre le judaïsme messianique et le millénarisme protestant.

Au début du XVIIe siècle, des théologiens protestants anglais ont commencé à défendre l’idée de réimplantation des juifs en Terre sainte afin de hâter le retour de Jésus et ainsi convertir les juifs au christianisme. Parmi ces théologiens protestants ayant promu ce projet, se trouvent Joseph Mede (1586-1635), Richard Baxter (1615-1691) et un parlementaire anglais, Sir Henry Finch (1558-1625), qui rédigea un ouvrage d’exégèse dans lequel il « prédit » le retour des juifs en Terre sainte : The World’s Great Restauration, or the Calling of the Jews.

L’Amérique judéo-protestante

Cette vision messianique originellement juive, devenue protestante, va s’implanter dans l’Amérique colonisée par les Anglais, qui se considéraient comme le nouveau peuple élu, l’Amérique comme la nouvelle Terre promise, terre des origines du monde, et quant aux Indiens,  une sous-race à exterminer, suivant le modèle du récit biblique de la conquête de la Terre promise par Josué :

« Et l’on appliqua l’anathème à tout ce qui était dans la ville ; hommes et femmes, enfants et vieillards, jusqu’aux bœufs, aux brebis et aux ânes, tout périt par l’épée. » (Josué, 6:21)

« Josué battit tout le pays, la montagne, le midi, la plaine et les coteaux, et il en battit tous les rois ; il ne laissa échapper personne, et il extermina tout ce qui respirait, comme l’avait ordonné Yahvé, le Dieu d’Israël. » (Josué, 10:40)

Or, cette conception raciste et génocidaire est celle des Anglais protestants (en bons héritiers du judaïsme), mais du point de vue catholique, il en est autrement. En effet, la question de l’humanité des Indiens donne matière à débat à la Renaissance. La controverse de Valladolid (Espagne), en 1550-1551, permet au dominicain Las Casas de réaffirmer le devoir missionnaire des chrétiens face aux indigènes[15].

La question réémerge au siècle suivant quand le calviniste Isaac de La Peyrère (1594-1676) avance l’hypothèse que les premiers habitants de l’Amérique seraient les descendants d’une humanité antérieure à Adam[16].

John Lock, dans le second de ses Deux traités de gouvernement (1690), donne à l’Amérique son statut et sa fonction philosophique : « Au début, écrit-il, le monde était l’Amérique. »[17]

De terre origine du monde, l’Amérique est devenue, au XVIIIe siècle, une annonce prophétique de l’avenir. Dans la conscience d’une certaine élite européenne et anglaise, l’Amérique était liée à l’espérance messianique de la rédemption, en grande partie sous la pression du mouvement évangélique qui fait de l’ancienne terre de mission un foyer missionnaire.

Au XIXe siècle, Alexis de Tocqueville avait bien perçu cette transformation : « Il me semble voir toute la destinée de l’Amérique renfermée dans le premier puritain qui aborda sur ses rivages, comme toute la race humaine dans le premier homme. »[18]

Dès 1781, l’abbé Guillaume-Thomas Reynal a annoncé la possibilité d’une colonisation à rebours de l’Europe par l’Amérique : « On va jusqu’à craindre que l’Europe ne trouve un jour des maîtres dans ses enfants. »[19]

Parallèlement, dans l’Angleterre des XVIIIe et XIXe siècles, le mouvement proto-sioniste protestant, aussi appelé restaurationnisme, se prolonge, et il est représenté par des personnages comme Thomas Newton (1704-1782), évêque de Bristol, et Anthony Ashley Cooper (1801-1885), comte de Shaftesbury.

Finalement, le restaurationnisme (proto-sionisme) et le messianisme américain, deux mouvements protestants dérivant du messianisme juif, convergeront et guideront la politique étrangère américaine, en définitive au profit d’Israël.

L’alliance des judéo-protestants et des saoudo-wahhabites

Entre 1744 et 1745, le père du wahhabisme – doctrine hérétique au regard de l’islam et de ses savants[20] – Muhammad Ibn Abd al-Wahhab conclut un pacte d’alliance (le pacte du Nadjd) avec le chef de la tribu des Saoud. Ce pacte fit des Saoud les porte-drapeaux du wahhabisme et d’Ibn Abd al-Wahhab ainsi que sa descendance les chefs religieux de la dynastie saoudite ; celle-ci utilisa alors la doctrine wahhabite en tant que moyen de conquête et d’appropriation patrimoniale de l’Arabie – conquête dont résulteront trois royaumes saoudites successifs.

Ibn Saoud et Ibn Abd al-Wahhab vont se livrer à une série de destructions et de massacres de musulmans, similaires à ceux perpétrés contre les catholiques irlandais et écossais par le protestant puritain Olivier Cromwell (1599-1658).
À titre d’exemple, les wahhabites ont tué entre 2 000 et 5 000 personnes à Kerbala en 1801, ils ont massacré hommes, femmes et enfants, et sont allés jusqu’à éventrer les femmes enceintes[21]

C’est cette méthode de terreur qui a été appliquée par les terroristes à l’époque contemporaine en Syrie, en Libye, en Irak… Tous financés par l’Arabie saoudite et le Qatar, armés et soutenus ouvertement par les États-Unis et leurs alliés. Ce que le New York Times a fini par admettre dans un article du 23 janvier 2016[22].

Les saoudo-wahhabites sont soutenus par les Britanniques depuis la Première Guerre mondiale, et sans leur appui, le Royaume saoudite actuel, fondé en 1932, n’aurait jamais vu le jour. Et à partir de 1945, les Américains prennent le relais de l’Empire britannique finissant. Le 14 février 1945, le roi Abdelaziz ibn Saoud et le président américain Franklin Delano Roosevelt se rencontrent sur le croiseur Quincy ; un pacte est conclu : en échange du pétrole d’Arabie, le royaume des Saoud se trouvera désormais placé sous la protection des États-Unis.

Avec le couplage du pétrole saoudien et du dollar américain, débute la phase d’expansion de la doctrine wahhabite – sponsorisée par les pétrodollars – en dehors de l’Arabie. Le wahhabisme part alors à la conquête de l’islam, notamment via de nombreuses institutions comme le Congrès islamique mondial (1949-1952), le Congrès islamique de Jérusalem (1953), le Haut Conseil des Affaires musulmanes (1960), l’Organisation de la Confrérie islamique (1969), la Ligue du Monde musulman (1962), l’Assemblée mondiale de la jeunesse musulmane (1972).

Les saoudo-wahhabites financent aussi des chaires universitaires à Harvard, en Californie, à Santa Barbara, à Londres ainsi qu’à Moscou. En outre, l’Arabie saoudite détient, en termes financiers, 30% de l’enveloppe satellitaire arabe, cinquante chaînes de télévision et autant de titres dans la presse écrite.

Le terrorisme wahhabite est ensuite devenu l’outil géostratégique de l’impérialisme anglo-américain. Zbigniew Brzezinski (1928-2017), alors conseiller à la Sécurité nationale des États-Unis (du 20 janvier 1977 au 20 janvier 1981) sous la présidence de Jimmy Carter, a été, à la fin des années 1970, le maître d’œuvre d’une manœuvre de coordination de la CIA avec les services pakistanais et saoudiens, dans le but de financer et d’armer les futures terroristes, dont Ben Laden. L’objectif de Brzezinski était d’attirer l’Union soviétique dans le cimetière afghan. Cette stratégie a été employée à nouveau dans la fin des années 1990 en Tchétchénie, pour faire imploser la Fédération de Russie ; et à nouveau après la guerre de 2003 en Irak, et depuis 2011, en Libye, en Syrie, au Yémen et ailleurs…


Brzezinski expliquera d’ailleurs lors d’une interview accordée au Nouvel Observateur le 15 janvier 1998 « comment et pourquoi il a financé Ben Laden en Afghanistan »[23].

À la question : « Vous ne regrettez pas d’avoir favorisé lintégrisme islamiste, d’avoir donné des armes, des conseils à de futurs terroristes ? », Brzezinski répondit : « Qu’est-ce qui est le plus important au regard de l’histoire du monde ? Les talibans ou la chute de l’empire soviétique ? Quelques excités islamistes ou la libération de l’Europe centrale et la fin de la guerre froide ? »

Ce qu’explique Brzezinski, qui demeura l’un des plus influents géo-stratèges aux États-Unis, c’est que ce terrorisme est une création artificielle et que son ampleur dépend de la politique occidentale, et plus précisément anglo-américaine.

Le terrorisme wahhabo-takfiri, dont le premier ennemi est le monde musulman (là où il fait le plus de morts), est un outil dans la géopolitique mondiale, à l’instar de l’armée américaine, qui sert principalement les intérêts d’Israël. Un outil multifonctionnel, qui détruit les voisins d’Israël, exacerbe les tensions entre Edom (l’Occident) et Ismaël (le monde musulman), pour finalement provoquer une conflagration mondiale.

Un risque de guerre mondiale d’autant plus élevé que l’empire américain est dans un état de fébrilité qui s’aggrave au fur et à mesure que sa puissance décline. Et cette fébrilité est instrumentalisée par les Israéliens et les Faucons américains qui sont à leurs ordres.

Fracture dans le système impérial américain

L’agressivité grandissante des États-Unis depuis les années 1990 a pour origine un déclin progressif sur les plans économique, militaire et moral. Une diminution de puissance dans un monde de plus en plus difficile à dominer, notamment depuis la réémergence de la Russie et de ses alliés.

Arrivée à un stade régressif avancé et alarmant, l’Amérique avait, durant l’élection de 2016, deux voies qui s’offraient à elle : poursuivre sa course de destruction du monde et d’autodestruction, en choisissant la représentante de l’impérialisme néoconservateur, Hillary Clinton ; ou, avec le vote Trump, se recentrer sur elle-même, dans une logique isolationniste afin de se régénérer, notamment économiquement, et renoncer à l’empire global.

Quoi qu’on dise de la politique de Donald Trump, sa victoire électorale, sur les thèmes du protectionnisme économique et de l’isolationnisme géopolitique, fut en soit un tournant historique significatif. 

En somme, il symbolisait le rejet par le peuple américain du globalisme au profit de la nation, et il a par conséquent ouvert une brèche dans le système impérial, car la remise en question de son idéologie devait entraîner l’accélération de l’affaiblissement de ses structures.

Impérialisme guerrier et globalisme contre isolationnisme géopolitique et protectionnisme. Tel était, au fond, le clivage idéologique au cœur du débat aux États-Unis durant l’élection présidentielle de 2016.

En pleine période de campagne présidentielle, le chef d’état-major de l’Armée américaine, le Général Mark Milley, avait menacé directement la Russie, la Chine et leurs alliés lors d’un discours public donné durant la réunion annuelle de l’Association of the United States Army à Washington D.C., le 4 octobre 2016.

Ce discours belliciste hystérique – qui masque mal la faiblesse et l’anxiété des impérialistes américains – était la traduction verbale de la politique qu’avait l’intention de mener Hillary Clinton.

Quant à l’impérialiste intelligent et subtil qu’était Zbigniew Brzezinski (1928-2017), il avait compris (trop tard) qu’il fallait renoncer à l’Empire global. Il a publié le 17 avril 2016 dans la revue The American Interest un texte au titre explicite « Toward a Global Realignment » (Vers un réalignement global). Son objectif était d’éviter une conflagration mondiale, tout en maintenant l’influence américaine dans le monde ainsi que ses positions stratégiques, par une négociation et un partage du monde avec la Russie et la Chine. Une sorte de Yalta II sans troisième guerre mondiale.

Si le poids de l’histoire, des contraintes matérielles et de l’affaiblissement de l’idéologie globaliste pèse en faveur de l’isolationniste Donald Trump, l’État profond, impérialiste et belliqueux, n’a aucunement l’intention de reculer.

C’est ce qui explique la dichotomie de la politique étrangère américaine depuis l’arrivée de Trump à la Maison-Blanche.

L’Empire américain, ayant perdu son soft power, n’a plus que sa machine de guerre pour se « légitimer » en tant que puissance dominante au regard des nations.

Mais cette machine de guerre impressionne de moins en moins depuis la réémergence des grandes puissances capables de rivaliser avec elle (la Russie et la Chine), et de puissances moyennes (à l’instar de l’Iran) qui tiennent tête au camp atlanto-israélien. Ces nations qui ont rétabli un équilibre des forces géopolitiques à l’échelle mondiale.

Les réseaux pro-israéliens, qui poussent toujours vers la guerre, s’accrochent à la faction impérialiste américaine, l’accompagnent, et orientent ainsi sa puissance guerrière dans la direction des intérêts israéliens.

D’ailleurs, Zbigniew Brzezinski avait parfaitement compris le jeu israélien. Ainsi, concernant la volonté de l’État hébreu d’attaquer l’Iran, il avait déclaré en 2012, lors d’une conférence organisée par le National Iranian American Council :

« Je ne pense pas qu’il y ait la moindre obligation implicite pour les États-Unis de suivre comme des ânes stupides tout ce que font les Israéliens ! Si les Israéliens décident de déclencher une guerre simplement en présumant que nous (les États-Unis) y serons automatiquement entraînés, je pense qu’il est de notre devoir en tant qu’amis de leur dire :  »Vous ne prendrez pas à notre place des décisions qui relèvent de notre intérêt national ». »[24]

Et cet avis est répandu dans l’appareil d’État américain, particulièrement au Pentagone[25].

Fracture dans le monde juif, des temps bibliques à nos jours

C’est dans l’Antiquité qu’est née l’opposition interne au monde juif, telle qu’on la voit éclater aujourd’hui, entre dirigeants israéliens et diaspora juive. L’histoire biblique offre, de ce point de vue, des clefs de compréhension indispensables[26].

L’antique opposition entre la diaspora juive et les Judéens

Après le siège de Jérusalem (en -597), les Babyloniens décident une déportation de grande envergure qui touche surtout la ville de Jérusalem. Le roi est exilé avec l’élite de la cour : hauts fonctionnaires, clergé et artisans. En -587, les Babyloniens détruisent le Temple, la ville et les murs de Jérusalem ainsi que d’autres centres judéens. Ces événements sont suivis d’une seconde déportation, puis d’une troisième en -582.

Certains textes bibliques donnent l’impression que Juda était un pays vide[27] durant l’époque d’exil à Babylone, créant ainsi le mythe selon lequel tout Juda fut déporté :

« C’est ainsi que Juda fut déporté loin de sa terre » (2 Rois 25, 21)

Dans la propagande sioniste contemporaine, le mythe du pays vide a été utilisé comme argument pour justifier l’occupation et la colonisation de la Palestine. D’après ce mythe, bien résumé par le slogan « une Terre sans peuple pour un peuple sans terre », lorsque les premiers sionistes arrivèrent en Palestine, la terre était vide et non cultivée, et les Palestiniens n’avaient quant à eux aucune existence en tant que population indigène.

Les exilés à Babylone constituaient l’élite judéenne qui se considérait comme le « vrai Israël », méprisant les Judéens du bas peuple restés en Juda.

Dans les textes bibliques, à quelques exceptions près, l’essentiel de ce qui est rapporté sur la vie à Juda l’est dans la perspective des exilés à Babylone ; surtout de ceux de la première déportation, en -597.[28]
Ainsi, comme le souligne le bibliste Thomas Römer, on trouve, notamment dans le livre d’Ézéchiel, des polémiques virulentes contre les gens restés dans le pays, qui sont considérés comme rejetés par Yhwh (Yahvé), lequel, selon les dires des rédacteurs du livre, aurait quitté son pays pour accompagner les exilés à Babylone[29].

Les Babyloniens avaient laissé se maintenir cette communauté d’élite qui avait prospéré[30]. Les textes bibliques mentionnent un certain nombre d’endroits habités par des Judéens déportés : Tel-Aviv sur le canal Kebar (Ézéchiel 3, 15), probablement en Babylonie centrale, près de Nippour ; Tel Mèlah, Tel Harsha, Keroub-Addân, Immer (Esdras 2, 59) ; Kasifya (Esdras 8, 17).

Une tablette cunéiforme de Babylone de la collection Moussaïeff (si elle est authentique[31]) datant des débuts de l’époque perse, contient un contrat de vente d’animaux dans lequel sont cités des personnages portant des noms yahwistes. Chose intéressante, ce contrat est dit avoir été conclu dans une ville du nom d’ « Al-Yahûdû » (« la [nouvelle] Judée »), « l’an 24 de Darius, roi de Babylone, roi des pays »[32]. Ce nom, Al-Yahûdû, correspond à celui que l’on trouve dans une chronique babylonienne pour désigner Jérusalem. C’est donc une « nouvelle Jérusalem » fondée par des Judéens en Babylonie. Cela témoigne de l’importance et de l’aisance économique de la Golah (terme utilisé pour les exilés judéens à Babylone)[33].

Le pouvoir économique et idéologique était entre les mains de cette Golah rentrée à Juda, qui contrôla la ville restaurée de Jérusalem[34].

Comment alors ne pas faire le parallèle avec la situation de l’État d’Israël contemporain dont la puissance et l’influence internationale est garantie, pour l’essentiel, par la Diaspora juive en Occident[35], tout particulièrement aux États-Unis[36] et en Europe de l’Ouest ?[37]

Opposition entre la diaspora juive libérale et les dirigeants Israéliens

L’État d’Israël contemporain, qui est isolé diplomatiquement et au pied du mur militairement[38], traverse une tourmente, celle des oppositions internes à la communauté juive.

Une partie de diaspora juive, pourvoyeuse de fonds de l’État hébreu (et qui garantit, via ses lobbies, le soutien apporté par les pays occidentaux à Israël), perçoit depuis quelques temps l’État hébreu comme un danger et un boulet. En effet, l’affirmation de plus en plus outrancière du caractère religieux de l’État juif et sa légitimation sur une base biblique, sa politique d’épuration ethnique fondée sur la Torah et le Talmud[39], les atrocités dont sont victimes les Palestiniens… Tout cela contribue à faire augmenter tendanciellement l’hostilité envers Israël, et par suite, au judaïsme et aux juifs à travers le monde ; ce qui met par conséquent en péril la diaspora.

Raison pour laquelle le président du Congrès juif mondial, Ronald Lauder, qui a financé la carrière politique de Benjamin Netanyahou, s’en est pris à ce dernier à deux reprises dans le New York Times[40] en 2018. Il a ainsi fustigé la politique israélienne :

« Les juifs de l’ère nouvelle ont fusionné notre fierté nationale et notre appartenance religieuse avec un dévouement au progrès humain, à la culture du monde et à la moralité.

Conservateurs et libéraux, nous croyons tous en un sionisme juste et un judaïsme pluraliste qui respecte chaque être humain. Ainsi, lorsque les membres du gouvernement actuel d’Israël sapent l’alliance entre le judaïsme et l’éveil, ils annihilent la quintessence de l’existence juive contemporaine. »[41]

Outre le danger que présente Israël pour les juifs du monde entier, on a là l’illustration d’une opposition entre les juifs libéraux, qui défendent un judaïsme réformé, représenté ici par Lauder, et les juifs orthodoxes, qui ont pris le pouvoir en Israël. Et c’est eux que pointe du doigt Lauder quand il écrivait en mars 2018 :

« En se soumettant aux pressions exercées par une minorité en Israël, l’État juif aliène une grande partie du peuple juif. »[42]

Par ailleurs, la vague souverainiste qui balaye l’Occident depuis 2016 a conduit Israël à se repositionner en faveur de ce populisme européen qu’il tente de récupérer. Cette tentative fut notamment illustrée par un livre écrit par le journaliste israélien Anshel Pfeffer, correspondant de The Economist et éditorialiste au journal israélien Haaretz. Son ouvrage, intitulé Bibi, est une biographie valorisante de Netanyahou, dont Anshel Pfeffer redessine les traits pour en faire un homme cultivé, un brillant visionnaire, leader mondial et un exemple des dirigeants politiques, tel qu’Orban, Trump et Poutine.

Dans un entretien titré « Pour les Trump, Poutine, Orban… Netanyahou fait office de patriarche »[43] accordé au journal Libération, le journaliste israélien avance que :

« Pour les Trump, Orban, Salvini, Duterte, Abe ou même Modi et Poutine – toute une génération de leaders qui défient le modèle progressiste occidental fondé sur le respect des droits de l’homme – Netanyahou fait office de patriarche, de modèle. Ils se disent : ‘‘Ce type est en poste depuis si longtemps, gagnant élections après élections, et il fait ce qu’on a toujours voulu faire : dire à la gauche et aux médias d’aller se faire foutre.’’ La conséquence, c’est que dans le club des grands de ce monde, les dirigeants à la Macron ou Merkel sont mis en minorité. Il est plus difficile que jamais de peser sur Netanyahou… »

C’est précisément la ligne adoptée par Éric Zemmour, le chantre, en France, du nationalisme israélo-compatible, qui expliquait en mai 2018 à la radio (de grande écoute) RTL, alors que les Israéliens tiraient sur des manifestants palestiniens : « Israël est la cible privilégiée des médias occidentaux qui ne cessent de dénoncer la brutalité des méthodes de la démocratie illibérale… Mais à Budapest comme à Varsovie, à Moscou comme à Jérusalem, les peuples votent massivement pour des gouvernements que ces grands médias vilipendent. »[44]

Mais les juifs ne voient pas tous d’un bon œil ce rapprochement que tente Israël avec les souverainistes européens. Parmi eux, les libéraux, l’aile gauche, s’insurgent contre cette alliance avec les populistes qu’ils considèrent comme « antisémites ». Certainement parce qu’ils gardent à l’esprit qu’historiquement le nationalisme européen n’est pas franchement philosémite…

Le 19 septembre 2018, le journal Haaretz a publié un article titré « L’État d’Israël contre le peuple juif »[45]. Et le journal de la gauche israélienne s’alarme : « Israël sest aligné à des régimes nationalistes, même antisémites… Un tremblement de terre est en train de doucement secouer le monde juif. »

Et Haaretz rappelle que « au XVIIIe siècle, les juifs ont commencé à jouer un rôle décisif dans la promotion de l’universalisme, car l’universalisme leur promettait l’émancipation de leur sujétion politique. À travers l’universalisme, les juifs pouvaient, en principe, être libres et égaux à ceux qui les dominaient. C’est pourquoi, dans les siècles qui ont suivi, les juifs ont participé en nombre disproportionné aux causes communiste et socialiste. C’est aussi pour cela que les juifs étaient des citoyens modèles dans des pays comme la France ou les États-Unis. Toutefois, l’histoire des juifs en tant que promoteurs des Lumières et des valeurs universelles touche à sa fin. Nous sommes les témoins stupéfaits de nouvelles alliances entre Israël, des factions juives orthodoxes à travers le monde, et un nouveau populisme global où l’ethnocentrisme et même le racisme tiennent une place centrale. »

Parmi les nouveaux « amis » d’Israël, on compte la Hongrie de Viktor Orbàn. Ce dernier, qui est devenu un ennemi acharné du financier juif américain (d’origine hongroise), maître des révolutions colorées, George Soros, a trouvé, dans cette lutte, un allié en la personne de Benjamin Netanyahou.

Ainsi que l’a mis en évidence le chercheur Pierre-Antoine Plaquevent, Israël soutient donc Orbán contre Soros, en échange de la promesse de la part du gouvernement hongrois de lutter par tous les moyens contre la montée de l’antisémitisme et de l’antisionisme[46]. Orbán a d’ailleurs, lors d’un discours public, inclut Israël dans la liste des nations qui résistent à Soros[47].

Mais les juifs libéraux, représentés par Haaretz, ne croient visiblement pas à cette amitié israélo-hongroise :

« Sous le gouvernement de Viktor Orbán, la Hongrie montre des signes troublants de légitimation de l’antisémitisme. En 2015, par exemple, le gouvernement hongrois a annoncé son intention d’ériger une statue de commémoration à Balint Homan, un ministre de l’ère holocaustique qui a joué un rôle décisif dans le meurtre et la déportation de près de 600 000 juifs hongrois. Loin d’être un incident isolé, quelques mois plus tard seulement, en 2016, une autre statue a été érigée en l’honneur de Gyorgy Donáth, un des architectes de la législation anti-juive durant la Seconde Guerre mondiale.

Il n’est donc pas surprenant d’entendre Orbán employer une rhétorique antisémite durant sa réélection en 2017, spécialement contre George Soros, le juif, milliardaire philanthrope américano-hongrois qui soutient les causes libérales, incluant l’ouverture des frontières et l’immigration. Réanimant les clichés antisémites à propos du pouvoir des juifs, Orbán accuse Soros de nourrir les intentions de subversion de la Hongrie. »

Paradoxalement, Haaretz, journal de gauche « universaliste », reproche à Netanyahou de « préférer les alliés politiques (Orbán) aux membres de sa tribu [Soros] ».

La même critique est faite à Netanyahou concernant son rapprochement avec la Pologne et le président philippin Rodrigo Duterte, « un homme qui s’est fièrement comparé à Hitler ».

Du point de vue des juifs libéraux, cette stratégie politique d’Israël met en péril la structure tripartite qui fonde la doctrine politique israélienne s’appuyant sur : les communautés juives de la diaspora ; les intérêts sécuritaires d’Israël ; et les alliances en politique internationale avec les puissances démocratiques du monde.

La Shoah, érigée en nouvelle religion profane (avec ses rites et lieux de pèlerinage) dans un occident déchristianisé, joue quant à elle le rôle de ciment idéologique qui maintient cette structure doctrinale aujourd’hui fragilisée.

L’actuelle politique de Netanyahou prend donc le risque de se couper de toute une partie des communautés juives qui apportent leur soutien politique, intellectuel et financier à Israël. Désormais, l’État hébreu, qui a amorcé depuis 1967, lentement mais sûrement, un virage (ou plutôt un retour) religieux, est devenu un pays dirigé par des messianistes fanatiques ; il devait par conséquent, en toute logique et nécessairement finir par se couper de la branche libérale du judaïsme. Israël revient à ses racines véritables : la religion juive et son émanation messianique[48].

C’est un choix que l’Histoire impose à Israël, un choix périlleux car il aggrave son isolement, lequel pourrait finalement coûter très cher à l’État hébreu et à la diaspora juive.

Youssef Hindi


[1] Pour une étude détaillée de la Bible hébraïque lire : Youssef Hindi, Occident & Islam – Tome II : Le paradoxe théologique du judaïsme. Comment Yahvé usurpa la place de Dieu, Sigest, 2018.

[2] Youssef Hindi, Occident & Islam – Tome I : Sources et genèse messianiques du sionisme. De l’Europe médiévale au Choc des civilisations, Sigest, 2015, chapitre I.

[3] Voir le détail de ce récit dans : Youssef Hindi, Occident & Islam – Tome I, chapitre I.

[4] Dans ses mémoires, Vol. 2, p. 711, Théodore Herzl écrit explicitement que les frontières du futur État d’Israël doivent s’étendre « du fleuve d’Égypte à l’Euphrate ».
Le Rabbi Fischmann, membre de l’Agence juive pour la Palestine, a déclaré dans son témoignage au Comité spécial d’investigation de l’ONU du 9 juillet 1947 : « La Terre promise s’étend du fleuve d’Égypte à l’Euphrate. Elle inclut une partie de la Syrie et du Liban. »

[5] Stephen Walt et John Mearsheimer, Le Lobby pro-israélien et la politique étrangère américaine, La Découverte, 2009, p. 270.

[6] J’ai analysé dans Occident & Islam – Tome I des évènements majeurs dans l’histoire de l’Angleterre du XVIIe siècle, qui transformeront historiquement et de manière décisive — notamment à l’occasion des deux guerres mondiales — le rapport de ce monde anglo-saxon à l’Europe continentale.

[7] Y. Hindi, Occident & Islam – Tome I, chapitre I.

[8] Cf. Y. Hindi, La Mystique de la Laïcité, Généalogie de la religion républicaine, 2017, Sigest.

[9] Thèse que René Guénon développe dans La Crise du monde moderne, 1927.

[10] Arnold J. Toynbee, L’Islam, l’Occident et l’avenir, 1947, 2013, Editions Des Malassis, pp. 14-15.

[11] Voir le site du Congrès mondial des religions : http://www.religions-congress.org/component/option,com_frontpage/Itemid,1/lang,english/

[12] Y. Hindi, Occident & Islam- Tome I, chap. II.

[13] Euronews, « Kazakhstan : une quête d’unité spirituelle », 04/06/12.

[14] Gershom Scholem, La Kabbale : Une introduction. Origines, thèmes et biographies, Gallimard, coll. « Folio Essais », 2003, p. 142.

[15] J. Dumont, La Vraie Controverse de Valladolid, Paris, Critérion, 1995.

[16] Isaac de La Peyrère, Preadamitae, sl, 1655.

[17] Bernard Cottret, Histoire de la réforme protestante xvie-xviiie siècle, Perrin, 2001, p. 209.

[18] Alexis de Tocqueville, De la démocratie en Amérique, Paris, Gallimard, 1986, I, p. 414.

[19] G. Esquier, L’anticolonialisme au xviiie siècle, Paris, PUF, 1951, p. 290.

[20] https://youssefhindi.fr/2015/12/09/la-verite-sur-le-wahhabisme-des-saoud-a-daech/

[21] Faits rapportés par diverses sources arabes et étrangères : Hamadi Redissi, Le pacte de Nadjd, ou comment l’islam sectaire est devenu l’islam, Seuil, 2007, pp. 52-53.

[22] https://www.nytimes.com/2016/01/24/world/middleeast/us-relies-heavily-on-saudi-money-to-support-syrian-rebels.html

[23] https://www.investigaction.net/fr/034-Pourquoi-et-comment-j-039-ai/

[24] https://www.youtube.com/watch?v=ifEGiJ2ZxDM

[25] Sur le sujet, lire : Y. Hindi, Chroniques du sionisme, Kontre Kulture, 2019.

[26] Voir : Youssef Hindi, Occident & Islam – Tome II : Le paradoxe théologique du judaïsme, 2018, Sigest.

[27] Sur le mythe du pays vide, voir Hans M. Barstad, The Myth of the Empty Land: A Study in the History and Archeology of Judah during the « Exilic » Pe- riod, Oslo, Scandinavian University Press, 1996.

[28] Youssef Hindi, Occident & Islam – Tome II : Le paradoxe théologique du judaïsme, pp. 275-279.

[29] Thomas Römer, L’invention de Dieu, Seuil, 2014, p. 280.

[30] Sur la communauté judéenne à Babylone, voir aussi : Yehezkel Lévy, « L’exil de Babylone : les sources traditionnelles et la question de l’émancipation », dans Des Juifs contre l’émancipation, Hermann, 21/12/2007.

[31] Cette collection vient du « marché gris », c’est-à-dire de marchands d’antiquités.

[32] Francis Joannès et André Lemaire, « Trois tablettes cunéiformes d’onomastique ouest-sémitique (collection Sh. Moussaïeff) (Pls. I-II) », Transeuphratène, 17, 1999, p. 17-34, p. 17-27, 33.

[33] Sur l’importance de la communauté judéenne à Babylone, et l’influence qu’exercera sur elle la culture babylonienne, lire : Youssef Hindi, Occident & Islam – Tome II : Le paradoxe théologique du judaïsme, chapitre VII.

[34] Thomas Römer, op. cit. p. 313.

[35] Jacques Attali affirma à ce propos que « La diaspora est la condition de survie d’Israël », Tribune juive, 08/11/1994.

[36] Voir : S. Walt et J. Maersheimer, Le lobby pro-israélien et la politique étrangère américaine, traduction française : La Découverte, 2009.

[37] Sur l’influence du lobby pro-israélien en Europe, lire : David Cronin, Sarah Marusek, David Miller, The Israel Lobby and The European Union, Public Interest Investigations, 2016.

[38] Voir : Y. Hindi, Chroniques du sionisme.

[39] Sur le sujet, lire : Y. Hindi, « Aux origines religieuse de la politique israélienne. Expansionnisme et épuration ethnique », Geopolintel, 24/07/2018 : http://www.geopolintel.fr/article2022.html

[40] https://www.nytimes.com/2018/03/18/opinion/israel-70th-anniversary.html?rref=collection%2Ftimestopic%2FIsrael&action=click&contentCollection=world&region=stream&module=stream_unit&version=latest&contentPlacement=1&pgtype=collection

[41] https://fr.timesofisrael.com/quand-celui-sans-qui-netanyahu-ne-serait-pas-netanyahu-le-critique-ouvertement/

[42] https://fr.timesofisrael.com/lauder-la-mort-de-la-solution-a-2-etats-est-une-grave-menace-pour-israel/

[43] http://www.liberation.fr/debats/2018/07/19/anshel-pfeffer-pour-les-trump-poutine-orban-netanyahou-fait-office-de-patriarche_1667588

[44] https://www.youtube.com/watch?v=pOUEzNTegvY

[45] https://www.haaretz.com/amp/israel-news/.premium.MAGAZINE-the-state-of-israel-vs-the-jewish-people-1.6470108?__twitter_impression=true

[46] Pierre-Antoine Plaquevent, Soros et la société ouverte, Le retour aux sources, 2018, pp. 325-328.

[47] Cf. P.A. Plaquevent, op. cit. pp. 327-328.

[48] Cf. Youssef Hindi, Occident & Islam – Tome I : Sources et genèse messianiques du sionisme, Sigest, 2015.