Les Français et la guerre en Ukraine : une adhésion en trompe-l’œil

Par le Dr. Raphaëlle Auclert pour Strategika 

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Après 13 mois de guerre en Ukraine, la société Kantar a interrogé les Français sur leur perception du conflit et de ses belligérants, réels ou tacites. Bien qu’au premier abord les Français semblent suivre l’exécutif dans son alignement sur la politique otanienne, un examen plus approfondi montre une certaine inquiétude et un souhait marqué de se désengager du conflit.

A la question « selon vous, les Etats-Unis ont-ils un intérêt à une résolution pacifique et rapide du conflit ? », près des trois quarts (74%) ont répondu par l’affirmative contre un quart de sondés plus sceptiques envers la politique américaine.

Néanmoins, cette confiance envers nos alliés atlantiques semble s’effriter lorsqu’est posée la question des origines de la guerre : un tiers (31%) des personnes interrogées n’exclue pas que les Etats-Unis aient pu eux-mêmes la provoquer. Ainsi, malgré le climat général de peur de la menace russe et de risque nucléaire entretenu depuis un an par les médias, une frange non négligeable de la population n’ignore pas les opportunités tant géopolitiques qu’économiques que représente cette guerre pour Washington. Pour ne citer qu’un exemple, mentionnons la prédation des terres arables ukrainiennes par les fonds anglo-saxons, agissant par l’entremise d’oligarques sans scrupules. Selon un rapport de l’Oakland Institute datant de février dernier, ceux-ci en détiendraient d’ores et déjà près du tiers. Et cette politique de vente du pays à la découpe n’est pas prête de s’arrêter, puisque les institutions financières engagées dans la reconstruction du pays conditionnent leurs prêts à des réformes de privatisation et de libéralisation de pans entiers de l’économie ukrainienne, dont l’agriculture fait partie.

Cette même réserve se retrouve au sujet de l’engagement français. Interrogés sur le camp que devrait soutenir la France, une majorité (64%) se prononce pour la coalition ukraino-otanienne et une minorité (4%) pour la Russie. Toutefois, un tiers des répondants s’avère nettement moins va-t-en guerre que nos dirigeants et prône la neutralité.

Pour conclure, il apparaît que ce sondage reflète la version dominante véhiculée par les médias, qui est une charge unilatérale contre la Russie, accusée d’être l’agresseur mû par ses seules pulsions impérialistes. Comme à la grande époque du maccarthysme, toute personne proposant une approche plus pondérée prenant en compte la vision russe, l’histoire des deux pays, l’équilibre géopolitique mondial… bref, une réflexion scientifique et non idéologique, est immédiatement brûlée vive sur les réseaux sociaux et bannie. On note au passage que ce discours au formol n’a pas changé depuis 75 ans et aurait besoin, à tout le moins, d’être mis à jour et adapté au monde tel qu’il est en 2023.

Enfin, il est significatif que malgré la propagande antirusse omniprésente, une part importante de la population (un tiers) ait conservé suffisamment de lucidité pour appeler de ses vœux une position neutre de la France. On peut suggérer deux raisons à ce choix : la première est la puissance militaire russe (par son nombre et ses prouesses technologiques) et la seconde est le risque d’engrenage des alliances qui, par deux fois au siècle dernier, mit la France en péril. Cette réaction est à mettre en perspective avec la série de rassemblements pour la paix qui se sont tenus ces derniers mois dans de nombreuses villes de France et d’Europe.

Méthodologie de recueil

L’enquête a été menée auprès d’un échantillon de 255 personnes, représentatif de la population française âgée de 18 ans et plus. La représentativité de l’échantillon a été assurée par la méthode des quotas (sexe, âge) après stratification par région et catégorie d’agglomération. Les interviews ont été réalisées par questionnaire auto-administré du 30 au 31 mars 2023.

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