« La France et le monde sont dans une situation où il n’y a plus rien à faire ; je ne souhaite pas que leréférendum réussisse » : le Général de Gaulle face au Kali-Yuga français – Nicolas Bonnal
Par Nicolas Bonnal
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J’ai évoqué la chute de la France sous la présidence de de Gaulle : pour un Québec libre d’ailleurs peu
suivi d’effet, il a fallu se payer l’industrialisation, la pollution, l’immigration, mai 68, la contestation
sociale, le noyautage culturel marxiste (cf. Eric Zemmour sur le rôle sinistre de Malraux), le pays de
Cocagne de Pierre Etaix et le Play-Time de Tati, sans oublier l’Alphaville de Godard. On y créa le froncé
abruti, tétanisé, hébété, qui a rompu avec tous les modèles antérieurs et était prêt pour la goberge télé et bagnole. Je vais écrire et publier un livre sur ce thème : la disparition de la France au cinéma. Car de Farrebique ou de Jean Devaivre (découvrez par exemple l’admirable Alerte au Sud sur notre chevaleriecoloniale, notre épopée saharienne) aux Valseuses et à Mortelle randonnée, on s’est bien effondré.
Le pire est que le Général, porté aux nues par des politiciens d’extrême-droite (la smalah JMLP-
Zemmour) qu’il aurait fait fusiller en 44, en est parfaitement conscient. On le sait, le vénérable et
pathétique-amusant Debré père qui est lui-même encore plus traumatisé par ce que devient et va
devenir la France au cours des années : marxisation culturelle via Malraux (voir livre p. 145), inflation et
taux d’intérêt à 15% (livre p. 151), relâchement moral et spirituel (et même militaire : on n’a pas plus
d’empire comme me le rappela mon ami historien de Sparte Nicolas Richer), effondrement du
christianisme, Debré et de Gaulle sont conscients de tout. L’Histoire de France est terminée et cela va se sentir.
Dans ses Entretiens avec le général, publiés par mon éditeur Albin Michel (moi mon dada c’était
Mitterrand, et je ne le regrette pas, j’en reparlerai un jour de Mitterrand), Debré écrit donc (p. 57-58) :
« J’évoque ces forces violentes qui désirent tant l’intégration de la France dans l’Europe, c’est-à-dire en
fin de compte la fin de la France, et je crains aussi que les divisions de l’Occident et l’incapacité
américaine ne conduisent notre civilisation au déclin décisif. Je parle d’abord des forces qui poussent à
l’intégration européenne: tous ceux qui Sont hostiles à l’Etat, tous ceux qui ne comprennent pas la
nécessité d’une pensée et d’une action indépendantes, se précipitent vers la supranationalité parce
qu’ils savent, au fond d’eux-mêmes, que la supranationalité, c’est le protectorat américain. »
On a parfaitement compris donc pourquoi Asselineau et Philippot qui sautent comme des cabris au nom du Général font 1% des voix. La masse veut la supranationalité et sans rire le protectorat américain avec ses armes qui ont cinquante ans de retard.
Dans le livre de Debré d’ailleurs le Général paraît souvent triste, distrait, impuissant (idem pour son fils
avec qui j’ai eu l’honneur de discuter aux jardins du Ranelagh si chers à mon maître et ami Parvulesco) ;
il est en position non de gourou mais de disciple anxieux et sans maître – comprendre ce que la France
devient à cette époque, il faut l’oser en effet, pas vrai ? –
« Le général de Gaulle m’interrompt pour me demander si je crois possible de résister à ces forces. « Il
n’y a que vous et moi qui pensons à l’Indépendance de la France.» Je lui réponds que nous devons être,
en réalité, plus que deux et j’ajoute qu’il y aura tellement de déceptions à la suite de cette politique
d’intégration qu’il ne faut pas douter d’être dans la vérité en expliquant qu’il faut faire l’Europe par
l’association des Etats et non par la disparition des nations, à commencer par la disparition de la
France. »
Malheureusement les réponses sont et seront matérielles et matérialistes (Pompidou-Giscard – deux
traîtres –, immobilier et nucléaire) :
« Que faire pour encourager ce mouvement ?» me dit-il. Je lui expose que les chemins sont clairs pour
maintenir aux Français et à la France la volonté de demeurer une nation. Il faut poursuivre notre effort
de modernisation industrielle. Il faut poursuivre notre volonté d’être une puissance militaire atomique
et il faut aussi ne pas chercher à nous dégager de nos responsabilités africaines. Je lui expose que ses
réticences à l’égard des réunions des chefs d’Etat africains d’expression française, réunions qui
pourraient avoir lieu autour de lui, aboutissent à couper des liens qui pourraient être renforcés. »
Le grand projet gaulliste est un leurre auquel Kerillis avait très bien tordu le cou.
De Gaulle échoue – mais il en ressort qu’on ne pouvait qu’échouer. Je confirme !
Sur le referendum – sa porte de sortie comme on sait – nous sommes clairement entendus :
«J’expose au Général que le but de ma visite est de préciser les conditions qui peuvent permettre le
succès, du référendum. Interruption du Général : « Je ne souhaite pas que le référendum réussisse. La
France et le monde sont dans une situation où il n’y a plus rien à faire et en face des appétits, des
aspirations, en face du fait que toutes les sociétés se contestent elles-mêmes, rien ne peut être fait, pas plus qu’on ne pouvait faire quelque chose contre la rupture du barrage de Fréjus. Il n’y aura bientôt plus de gouvernement anglais; le gouvernement allemand est impuissant ; le gouvernement italien seradifficile à faire; même le président des Etats-Unis ne sera bientôt plus qu’un personnage pour la parade.
Le monde entier est comme un fleuve qui ne veut pas rencontrer d’obstacle ni même se tenir entre des
môles. Je n’ai plus rien à faire là-dedans, donc il faut que je m’en aille et, pour m’en aller, je n’ai pas
d’autre formule que de faire le peuple français juge lui-même de son destin (p.112). »
On répète parce que c’est merveilleux :
« Je n’ai plus rien à faire là-dedans, donc il faut que je m’en aille et, pour m’en aller, je n’ai pas d’autre
formule que de faire le peuple français juge lui-même de son destin. »
Vive Pompidou, Beaubourg, Michel Sardou, la loi Veil et Emmanuelle..
C’est qu’il n’y a plus de religion. Debré ajoute ces lignes stupéfiantes :
« Le Général redit son analyse. Ce qui paraît le frapper le plus c’est le fait que les sociétés elles-mêmes
se contestent et qu’elles n’acceptent plus de règles, qu’il s’agisse de l’Eglise, de l’Université, et qu’il
subsiste uniquement le monde des affaires, dans la mesure où le monde des affaires permet gagner de
l’argent et d’avoir des revenus. Mais sinon il n’y a plus rien (p. 122). »
C’est le Kali Yuga, donc on ne peut rien faire – à part se remplir les poches, en bon vaisya. On peut se
demander quand même pourquoi la masse des couillons ne réagit plus. C’est ce que fait le Général :
«Le Général m’interrompt pour me dire, à la suite des exemples que je lui donne : « Comment se fait-il
que les chefs d’établissement ou les recteurs n’interviennent pas? » Je rappelle au Général ce que je
disais tout à l’heure. L’autorité n’existe plus de par la volonté délibérée du ministère de l’Education
nationale et j’ajoute en outre que, pour ce qui concerne les activités socio-éducatives. Les chefs
d’établissement ont des instructions formelles de ne point intervenir. Je regrette d’autant plus cette
abdication et cette complicité que l’on sent les prodromes d’une réaction. Le corps enseignant, même
dans ses éléments gauchisants, ne comprend plus cette anarchie et s’émeut de ses conséquences. »
Et puis de Gaulle comprend ensuite que la famille disparaît, qu’elle n’est plus la structure unifiant la
société chrétienne – puisqu’il n’y a plus de société chrétienne :
« Le Général me dit : « Comment se fait-il que les familles ne réagissent pas ?
La vie familiale aujourd’hui n’est plus celle d’hier. L’évolution fait que l’État, le corps enseignant ont pris
une responsabilité de plus en plus grande à l’égard des enfants. C’est là une situation à laquelle les
familles se sont peut-être trop facilement habituées. Au surplus les réactions des parents se dispersent
dans toute une série de directions : le programme, les examens, le comportement des professeurs, et,
de ce fait, quand elles s’orientent contre certaines dégradations de l’enseignement, n’ont pas la même
force (p. 174). »
La famille, seul Etat qui crée et aime ses citoyens (Chesterton), va disparaître.
C’est là que je cesse toute critique à son encontre (ce qui m’énerve c’est son culte). Il fallait passer le
témoin aux Giscard et aux soixante-huitards. La France moderniste, progressiste et républicaine voulait
son Kali-Yuga.
A ce propos et grâce aux talents de Tetyana j’ai scanné la page de Daniélou sur cette question
transcendantale :
« C’est armé de ce bagage que j’ai commencé à reprendre contact avec l’Europe qui m’est apparue
comme une région malade, atteinte d’une sorte de cancer qui fait que certaines cellules se développent de façon incontrôlée et contaminent peu à peu les autres. Ce développement a forcément une limite.
L’espace vital est de plus en plus réduit pour chacun dans ces énormes termitières qui recouvrent peu à
peu les campagnes et les forêts. Certains aspects de la vie prennent une place démesurée par rapport à
d’autres, créant un profond déséquilibre. La recherche de la prospérité étouffe celle de la sagesse et du bonheur de vivre. Je me suis interrogé sur les raisons qui rendaient les Occidentaux modernes si agités et en somme assez rarement heureux. »
Daniélou prévoit même l’autodestruction européenne que nous vivons – et qui promet d’être inévitable et épouvantable, tant la masse zombie de la société de consommation se laisse faire :
« Les Aryens dont sont issus la plupart des peuples qui ont dominé l’Europe, les Achéens, les Doriens, les Celtes, les Romains, les Germains, les Russes, sont des peuples de prédateurs. Ayant récemment envahi une grande partie de la planète, peuplé les Amériques et l’Australie, imposé leurs langues à l’Afrique et parfois même à l’Asie, ils ont atteint une limite et leur force d’expansion se retourne contre eux-mêmes.
Il semble peu probable qu’ils arrivent à se contrôler. C’est un vaste problème d’histoire. Lorsque
l’équilibre naturel est rompu, certaines espèces animales tendent à se multiplier jusqu’au point où elles
se détruisent elles-mêmes… »
De Gaulle et la vocation de la France ont disparu dans les années soixante (mon enfance) comme le
christianisme. On demande à Bruckberger de compléter (voyez mes textes). Il cite Lévi-Strauss dans une interview inouïe. Prince de la science humaine, le vieux savant juif devenu marginal génial répond
courageusement à une stupide interview catho :
« Je vous dirai que ce qui se passe dans l’Eglise depuis le dernier concile me trouble. Il me semble vu de
l’extérieur, que l’on appauvrit ou que l’on dépouille la foi religieuse (ou son exercice) d’une très grande
partie des va leurs propres à toucher la sensibilité, gui n’est pas moins importante que la raison. LE
JOURNALISTE. – Par exemple ?
C. LÉVI-STRAUSS. C’est vraiment l’appauvrissement du rituel qui me frappe. Un ethnologue a toujours le plus grand respect pour le rituel. Et un respect d’autant plus grand que ce rituel plonge ses racines dans un lointain passé. Il y verra le moyen de rendre immédiatement perceptibles un certain nombre de valeurs qui moins toucheraient directement l’âme si l’on s’efforçait de les faire pénétrer par des moyens uniquement rationnels, Louis XIV dit, dans son testament, en de s’efforçant justifier e cérémonial de la Cour, des choses assez profondes : qu’on ne peut pas demander à tout le monde d’aller au fond des choses Il faut qu’il y ait des expressions sensibles qui ne passent pas le biais de la connaissance discursive
Le journaliste vous pensez qu’affadissement du rituel d’un groupe social est le signe d’une crise de son
système des valeurs ?
- J’entends bien que tout rituel doit évoluer. Une société religieusement vivante serait une société
capable d’enrichir son rituel. Mais les tentatives de renouvellement du moins ce que j’en vois quand
j’assiste à des messes d’enterrement ou de mariage ne paraissent pas très convaincantes.»
Et le courageux Bruckberger, disciple de Bernanos, de conclure :
« On ne peut dire plus clairement, ni avec plus de prudence et de gentillesse, qu’en France, la réforme
liturgique issue du dernier concile est un fiasco. Un grand savant agnostique s’en dit troublé. Nos
évêques, eux, n’en sont nullement troublés : même si elle devait entraîner la mort du patient, ils nous
forceraient à tenir la bouche ouverte jusqu’à ce que toute la potion soit avalée. Un grand savant
explique ce qu’Aristote nous avait depuis appris : longtemps qu’il n’est rien dans qui ne l’intelligence quine soit d’abord tombé sous le sens et que tout ce qui touche la sensibilité, surtout si ça vient de loin,
doit être modifié avec la plus grande prudence.»
Flanqué de tels esprits le Général ne pouvait qu’exhaler cette grandeur triste (pensez au mage Taliesin)
que j’ai retrouvée dans les traits de son fils – honoré par une lettre de Vladimir Poutine hors de son
centenaire (les démons doivent en trembler encore), quand je parlais avec lui aux jardins du Ranelagh.
A nous d’en finir maintenant avec les démons déchaînés de l’enfer et de la médiocrité.
Sources :
https://www.amazon.fr/Pourquoi-Gaulle-adorait-Russie-anti-
globales/dp/1973503506/ref=sr_1_1?__mk_fr_FR=%C3%85M%C3%85%C5%BD%C3%95%C3%91&crid=1
QINALGLFYXOZ&keywords=BONNAL+GAULLE&qid=1686395376&sprefix=bonnal+gaulle%2Caps%2C153
&sr=8-1
https://www.amazon.fr/Chroniques-sur-lHistoire-Nicolas-
Bonnal/dp/1521035520/ref=sr_1_1?__mk_fr_FR=%C3%85M%C3%85%C5%BD%C3%95%C3%91&crid=3K
EPWTIKF3ZAG&keywords=BONNAL+CHRONIQUES&qid=1686395389&sprefix=bonnal+chronique%2Caps
%2C148&sr=8-1
https://nicolasbonnal.wordpress.com/2023/05/04/le-reverend-pere-bruckberger-et-lobsession-
suicidaire-de-la-race-blanche/
https://lecourrierdesstrateges.fr/2022/09/09/lecons-libertariennes-n19-alain-danielou-et-le-point-de-
vue-hindou-sur-le-kali-yuga-europeen-par-nicolas-bonnal/
https://nicolasbonnal.wordpress.com/2022/12/25/joyeuse-moelle-bruckberger-comprendrait-aussi-le-
besoin-de-suicide-assiste-que-le-vaccin-le-reset-la-guerre-et-le-grand-remplacement-fournissent-a-la-
vieille-race-blanche-voir-mon-livre-publie/
Daniélou – Le Chemin du Labyrinthe (Rocher)
Debré – Entretiens avec le général de Gaulle – Albin Michel
R.P. Bruckberger – Lettre ouverte à Jean-Paul II (Stock)
« J’ai évoqué la chute de la France sous la présidence de de Gaulle : pour un Québec libre d’ailleurs peu
suivi d’effet, il a fallu se payer l’industrialisation, la pollution, l’immigration, mai 68, la contestation
sociale, le noyautage culturel marxiste (cf. Eric Zemmour sur le rôle sinistre de Malraux), le pays de
Cocagne de Pierre Etaix et le Play-Time de Tati, sans oublier l’Alphaville de Godard. On y créa le froncé
abruti, tétanisé, hébété, qui a rompu avec tous les modèles antérieurs et était prêt pour la goberge télé et bagnole. »
Vous mélangez tout en vous arrangeant avec les dates : l’immigration, mai 68, la contestation sociale ne sont pas à porter au passif du Général, au contraire, ce fut la trahison des mafieux qui a créé cette révolution colorée à laquelle la génération de l’époque n’a rien compris !
Il faudrait élargir votre vision géopolitique de cette période pour comprendre les enjeux cachés qui pourtant apparaissent actuellement au grand jour…
Il fallait en finir avec cet Homme qui symbolisait la souveraineté et l’indépendance de la France dans un monde ravagé par le profit et le mensonge.
Quant à la pollution engendrée par le bond économique, deviendriez-vous « décroissant » et préférez-vous la pollution morale et spirituelle que nous subissons ?
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