James Fenimore Cooper et le rejet de l’Amérique moderne et démocrate – Nicolas Bonnal

Par Nicolas Bonnal

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Grand nostalgique, l’écrivain James Fenimore Cooper encense les indiens et rejette le monde moderne.
Nous avons déjà relié son œuvre à celle de Tolkien, les indiens en voie de disparition y tenant les rôles
des elfes, êtres supérieurs en voie d’exil et d’extinction.
Dans son grand livre la Prairie perdue, l’universitaire Jacques Cabau écrivait :

« Là, gentleman-farmer éclairé, véritable squire à l’anglaise, il devient le prototype même de ces princes
qui gouvernent alors l’Amérique, de cette nouvelle aristocratie qui s’est révoltée contre le roi
d’Angleterre parce qu’elle se sait destinée au gouvernement des masses. Le drapeau frappé de treize
étoiles flotte depuis quelques années seulement. On n’a pas encore inventé le dollar. On trace les plans
d’une capitale digne de treize Etats fédérés. Aucune frontière ne borne l’ambition de ces trois millions
d’Américains, fiers de leur liberté et de leurs sept cent mille esclaves. Mais la fédération des treize Etats
si différents n’est pas encore une nation. L’esprit colonial y perpétue les traditions et les préjugés
sociaux de la vieille Europe. »
Lothrop Stoddard et Madison Grant (cités dans un passage crypté de Gatsby – que j’ai commenté
ailleurs) ont dressé un portrait enchanté de cette Amérique coloniale que le premier comparait au
monde grec. Borges aussi encensa ce grand nombre de génies (Poe, Emerson, Hawthorne, Thoreau,
Whitman, Melville, etc.) qui vont tous ou presque rejeter l’involution du monde moderne en Amérique.
Mais Fenimore Cooper est le premier à rejeter l’involution de son pays (c’est vrai que pour en arriver à
cet océan de laideur urbaine, à Biden et à l’invasion migratoire, au wokisme, à la dette immonde et aux
néo-cons…) ; Cabau note :
« L’Amérique n’est alors ni une démocratie idéale, ni un paradis né des utopies du XVIIIème siècle. Il y a
vers l’Ouest des pionniers qui défrichent, des trappeurs qui explorent; il y a dans le Nord des
communautés utopiques et des exaltés qui parlent d’égalité et de droits de l’homme. Mais ces gens-là
ne comptent guère ; on les méprise même dans la bonne société des planteurs sudistes et des
négociants du Nord. »
On est encore dans une société aristocratique :
« Dans cette société encore coloniale où les grands propriétaires et les négociants viennent de conquérir
l’indépendance pour prendre le pouvoir et imposer leurs intérêts, les privilèges sociaux rendent la
naissance tout aussi nécessaire qu’en Europe. Pour avoir sa place, il faut être bien né. Cooper a tous les
traits de cette nouvelle classe dirigeante, austère, très consciente de ses devoirs comme de ses droits, et
qui donne l’exemple de la morale, de la dignité et du courage parce que son pouvoir est, comme la
démocratie qu’elle institue, d’essence paternaliste. Comme Sir Walter Scott, son maître en littérature,
Cooper est homme d’ordre, assez intolérant dans ses opinions théologiques, politiques et sociales, et
très conventionnel dans ses goûts. Il s’intéresse peu aux arts, lit de préférence des traités d’histoire, de
géographie, ou des récits de voyages, dont il est friand. »
Fenimore Cooper redoute cette immigration EUROPEENNE qui va détruire le pays (Tocqueville parle de
la menace de masses socialistes européennes immigrées à Philadelphie) :
« II est surtout féru de droit. Car ce grand propriétaire foncier, habile gérant de ses terres, s’inquiète des
libertés qu’on laisse aux immigrants de s’approprier les terres qu’ils défrichent. Cooper souhaite qu’au

lieu d’éparpiller les terres défrichées aux mains des petits colons, on les rassemble en latifundia, en
grand domaines. »

Fenimore Cooper s’exile en Europe comme bien des grands auteurs US (Henry James, Hemingway,
Fitzgerald…) ; et quand il revient notre aristocrate écologiste peut sangloter :

« Mais il lui faut déchanter, en 1833, quand il rentre en Amérique. Installé à Cooperstown, il découvre
une Prairie ravagée par les pionniers, les terres distribuées à l’encan, un gaspillage de toutes les
richesses naturelles, en particulier de la forêt. Il dénonce l’erreur d’une société de plus en plus
démocratique, de plus en plus urbaine et industrielle, qui sape ses fondements naturels, et gaspille ses
ressources en s’engageant à un rythme trop rapide dans une conception contestable du progrès. Ses
attaques contre l’Amérique, ses luttes avec une presse trop librement critique, ses procès enfin contre
les défricheurs de terres et les immigrants lui valent une réputation de réactionnaire et d’aristocrate
européen. Malgré le succès de ses romans, sa popularité en souffre. Comme sir Walter Scott, et pour les
mêmes raisons politiques, quand Fenimore Cooper meurt, en 1851, il est brouillé avec la nation
américaine dont il a pourtant, le premier, exprimé les traits les plus profonds. »

Nous avons écrit un texte sur le rapport de Fenimore Cooper à la presse. La typographie aura été le plus
grand ennemi de la civilisation (effondrement qualitatif) et aujourd’hui de l’humanité.
Jacques Cabau ajoutait même sur ce rejet élitiste des « modernes » qui nous fait préférer les indiens
(voir Schuon) :
« Les Pionniers, premier volume écrit, est le plus réaliste, le plus documentaire, qui décrit Templeton en
fait Cooperstown village de pionniers. Natty Bumppo, vieilli, maussade et bavard, vit là, dans une hutte
aux abords de la ville Natty est devenu une sorte de hors-la-loi. Il braconne, menace la maréchaussée, se
fait arrêter par le shérif, mettre au pilori, ne cesse de se révolter contre la civilisation qu’il hait parce
qu’elle a anéanti la forêt, c’est-à-dire la liberté. Avec la Prairie, qui décrit les derniers jours de Naty
Bumppo, le mythe prend toute son ampleur. Au seuil de la mort, le vieux trappeur octogénaire mais
encore valide, médite sur l’ensemble de sa vie, Seul avec Hector, son vieux chien édenté qui va le
devancer dans la mort, il a fui la civilisation jusqu’au plus profond de la Prairie, sur les contreforts des
Montagnes Rocheuses, où acculé au Pacifique, il se dresse soudain dans l’éclat du soleil couchant, et
meurt en criant ce mot cryptique et splendide : Here! Ainsi s’achève une vie qui n’a été qu’une longue
fuite devant la civilisation, et qui pose le problème de la marche vers l’ouest et de la disparition de la
Frontier. »

On découvrira notre livre sur les westerns et on reverra avec profit et enchantement le célèbre
documentaire Koyaanisqatsi en voyant le chaos déglingué cauchemardesque qui caractérise aujourd’hui
l’Amérique à Biden.

https://www.dedefensa.org/article/de-thoreau-a-koyaanisqatsi-la-civilisation-comme-apocalypse
https://www.dedefensa.org/article/james-fenimore-cooper-et-le-grand-patriarche-indien

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Une pensée sur “James Fenimore Cooper et le rejet de l’Amérique moderne et démocrate – Nicolas Bonnal

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