Débilocratie: la vraie guerre secrète qui menace l’Occident
Source : https://www.craft.me/s/jWnvnnvZKZnEvv – 2 octobre 2023 – Slobodan Despot
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Slobodan Despot, né le 24 juillet 1967 à Sremska Mitrovica (Voïvodine, ex-Yougoslavie, actuellement Serbie), est un éditeur et écrivain suisse d’origine serbe. Il est le cofondateur et le directeur des éditions Xenia à Sion. Il est le fondateur et le rédacteur en chef d’Antipresse.net.
La célébration d’un ancien SS par le parlement canadien n’est pas seulement une obscénité et une faute politique. C’est surtout une apothéose de la bêtise régnante. A ce stade-là, ce n’est plus un complot, c’est une pandémie.
O Canadiens, nous ne vous en demandions pas tant!
Le 22 septembre dernier, à l’occasion de la visite du président Zelensky à Ottawa, le parlement canadien a réservé une standing ovation à «un héros ukrainien, un héros canadien» en remerciement «de tout ce qu’il a fait». En réalité, Yaroslav Hunka était un volontaire de la division SS «Galicie» qui s’est illustrée par le massacre de nombreux Juifs, Polonais, Tchèques et Slovaques, et accessoirement aussi de partisans soviétiques. Le Canada a beau être le quartier général de l’émigration pronazie ukrainienne, le vieux crabe a tout de même dû tomber des nues: «Le Führer serait-il revenu?» Car il avait jusqu’alors le profil type de ces scélérats que le Centre Simon Wiesenthal, du vivant de son fondateur, serait allé traquer jusque dans les conduits de ventilation de la Station spatiale internationale.
Le contrecoup de l’événement est cocasse et colossal. Le Kremlin a remercié les Canadiens d’avoir obligeamment confirmé l’un des arguments essentiels de sa propagande: à savoir que l’Occident cajole, arme et protège les nazis. Le gouvernement polonais réclame la démission du président du parlement canadien et l’extradition de l’ancien SS. On remarque d’ailleurs nettement sur la vidéo que ledit président, M. Anthony Rota, s’étrangle à la lecture de son speech en comprenant soudain qui il s’apprête à honorer. (Où l’on voit l’inconvénient occasionnel qu’il y a à se contenter, en guise de travail politique, de lire au dernier moment les fiches qu’on vous met sous les yeux.)
Le Premier ministre Trudeau, faisant une fois de plus la preuve de sa bravoure en même temps que de son art de l’esquive, a déploré l’embarras du Parlement, comme si lui-même ne s’y était pas trouvé, applaudissant aux côtés de Zelensky (qui, lui, lève le poing en signe de soutien). Il en a profité pour se défausser sur le malheureux président Rota et, surtout, pour appeler à la lutte contre la propagande russe, comme si c’était elle, et non sa propre bêtise, qui lui avait refourgué ce vieux débris toxique.
A peine le bouc émissaire venait-il de prendre tout sur lui que les réseaux diffusaient un tweet de la bru de Hunka montrant son «dedo» (pépé) en chaise roulante «attendant dans le hall de rencontrer Trudeau et Zelensky», en ce poisseux vendredi 22 septembre. _Ach! Scheisse!_comme diraient les vilains de bande dessinée… Le chef de l’opposition conservatrice, Pierre Poilièvre, a rajouté une couche en affirmant que Trudeau avait «personnellement rencontré et honoré» l’oiseau, en ajoutant que lui seul, et son protocole, pouvaient et devaient savoir qui l’on introduisait dans l’assemblée.
Evidemment que Trudeau savait, mais entre le savoir et la pensée, il y a un fossé que ce benêt de fils à papa a rarement franchi. Si quelqu’un, en plus de savoir, avait pensé l’événement, c’est sans doute l’homme fort du pays, la vice-première ministre Chrystia Freeland, petite-fille de Mykhailo Chomiak, pronazi notoire, directeur des Krakivs’ki Visti, organe de la collaboration dont le jeune Yaroslav Hunka, à l’époque, devait être un lecteur fervent.
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Notule. L’ironie de l’histoire est cocasse à relever: le 21 août 1942, le journal de Chomiak titrait « Glorieuse victoire allemande à l’Ouest» en parlant du raid allié sur Dieppe où des milliers soldats canadiens furent tués, blessés ou faits prisonniers. Sa petite-fille n’a sans doute pas dû utiliser cette «une» comme dépliant électoral au Canada…
Cela dit, même en tenant compte du poids de l’émigration ukrainienne au Canada et de sa haine écumante de tout ce qui est russe, qu’avait-elle à gagner en poussant Yaroslav Hunka sous les feux de la rampe? Ces gens imaginaient-ils que le monde «libre» allait offrir à leur héros le Nobel de la Paix? Si quelqu’un a tiré profit de leur lobbying, c’est uniquement l’ennemi, la Russie. A croire que le speech sur le héros ukrainien a été glissé sur le pupitre du président par Vladimir Poutine lui-même…
Plus étrange encore: ne s’est-il trouvé personne, dans tout le parlement canadien, pour agiter un signal d’alarme en entendant l’expression «vétéran ukrainien de la lutte contre le communisme»? Manifestement non, puisque l’assemblée s’est levée comme un seul homme pour l’applaudir. Des parlementaires ont d’ailleurs été très heureux de publier des selfies en la compagnie du héros du jour. Quelle ne fut leur déconvenue post coitum…
La surprise du député Cherniak résume la réaction du troupeau:
«Lorsqu’un soi-disant héros de guerre a été présenté, je me suis levé et j’ai applaudi. J’ai supposé qu’il s’agissait d’un partisan qui avait combattu l’occupation communiste après la Seconde Guerre mondiale. Ayant appris qu’il était un membre volontaire d’une unité SS, j’ai la nausée.» Pauvre garçon! Comme il s’est fait avoir. Comme il en souffre! Bref, de deux choses l’une: soit le corps législatif canadien fait l’idiot, soit il est idiot. La première option n’est pas à écarter. La tentation nazie hante l’Occident comme un tabou érotique. La proscription minutieuse de tous les symboles hitlériens relève du fétichisme à l’envers. «Cachez cette cravache que je ne saurais voir!» gémit le Tartuffe moderne, adepte du bondage et des sexualités perverses. En Grèce, où l’on n’est pas aussi allergique à la brocante du IIIe Reich que dans l’ouest européen, les partis de droite et de gauche, dont Syriza, ont tous quitté l’assemblée le 7 avril 2022 lorsqu’un néonazi d’Azov amené par Zelensky s’est adressé au parlement. En somme, il n’y avait que le centre BCBG, pro-atlantiste et pro-européen, pour n’y rien trouver à redire. C’est un détail à méditer. Si, dans le cas des députés canadiens, nous écartons les penchants totalitaires — même si leur soutien à la dictature covidienne de Trudeau laisse planer la suspicion —, il ne reste que l’option de la crasse, épaisse et sordide bêtise. Le montreur forain crie: «gloire à l’Ukraine», tu répètes «gloire à l’Ukraine». Le montreur te dit de te lever et d’applaudir, tu te lèves et tu applaudis. Le montreur tend le bras droit et… Il est déconcertant de penser qu’un pareil cheptel élabore et vote les lois qui encadrent la vie des gens dans un pays industriel avancé. Ce n’est pas des dossiers qu’il faut présenter à ces gens, mais des meules de foin.
Les bons et les mauvais «nazis»
Je me suis demandé si le parlement aurait eu la même réaction grégaire dans le pays où je vis, la Suisse, qui passe pour la démocratie la plus «vertueuse» au monde. J’ai évoqué la question avec Oskar Freysinger, qui fut conseiller national (député) à Berne pendant trois législatures et dont je fus le chargé de communication entre 2013 et 2017 alors qu’il était conseiller d’Etat (ministre) en charge de l’instruction publique et de la sécurité du canton du Valais.
Oskar a encore cette particularité d’avoir été constamment suspecté de sympathies nazies au cours de sa turbulente carrière politique au sein de l’UDC (le premier parti du pays, souverainiste et anti-européen). Ses origines autrichiennes, je le sais, ne sont pas pour rien dans cet amalgame, elles ont d’ailleurs été éhontément exploitées par les belles âmes de gauche. Mais je sais aussi qu’il n’y a rien dans la vie et les idées de Freysinger qui puisse alimenter un tel reproche.
En revanche, dans son bureau, il y a un drapeau militaire allemand — non pas nazi, mais bien allemand, traditionnel, celui du Reich de Bismarck. Parce que, justement, il n’éprouve aucun érotisme trouble face au bric-à-brac hitlérien, Oskar a naïvement permis aux journalistes de photographier ce drapeau. Ce fut le prétexte d’une campagne de dénonciation hystérique visant, rien moins, qu’à détruire sa carrière politique. L’association pavlovienne liée à ce drapeau circule aujourd’hui encore sur les réseaux sociaux.
Quelque chose me dit que les pourfendeurs du drapeau d’Oskar, s’ils s’étaient trouvés au parlement de Trudeau, eussent ovationné le barbon de la SS comme tout le monde. Relisez la notice ci-dessus au sujet du fétichisme à l’envers…
Je lui ai quand même demandé, dix ans après cette stupide polémique, son sentiment à propos de l’incident canadien. Il m’a répondu sur le mode des «chasseurs», le célèbre sketch des Inconnus:
«Il y a les méchants méchants et les bons méchants qu’on applaudit au nom de la “bonne cause ukrainienne” (rires…).
— Penses-tu que le parlement suisse aurait applaudi comme les Canadiens ?
— Ils auraient peut-être été chercher l’info sur le passé du lascar, et puis ils seraient restés plus longtemps à l’apéro…»
Pas téméraires, mais pas idiots non plus. Il me semble en effet que certains élus suisses, ou en tout cas les présidents des chambres, se seraient renseignés un peu, qu’ils auraient rafraîchi quelques repères historiques. Mais — j’y pense soudain — il y a une différence entre les Helvètes et les adeptes du sirop d’érable. C’est que le Canada n’est pas seulement un repaire d’émigrés anticommunistes est-européens. C’est aussi le laboratoire mondial des nouvelles pédagogies scolaires. C’est la section «recherche et développement» de la fabrique du crétin. Le même Freysinger, justement, a passé son temps de ministre à bloquer les projets farfelus de déconstruction scolaire pleuvant comme des missiles depuis le Québec.
En matière d’enseignement de l’ignorance, les Canadiens ont une bonne génération d’avance sur nous. Leur jardin enchanté est hors du temps et de l’espace, comme le pays du magicien d’Oz. Ignorer les rudiments de l’histoire, de la logique, de la philosophie et de la grammaire y est un gage de socialisation. Ces abrutis parlementaires qui applaudissent tous ensemble sans savoir ce qu’ils applaudissent y sont des citoyens modèles.
La désinstruction, arme de destruction massive
La coïncidence est si frappante qu’un soupçon me revient. Dans les lointaines années 1980–1990, au moment où l’URSS vacillait, quelques auteurs très-méfiants et très-réactionnaires mettaient en garde contre la propagation du virus. Le communisme, clamaient-ils, n’est pas mort: il a abattu les cloisons pour nous infecter, et nous vaincre sans guerre. Comment? Essentiellement par la destruction des fondements de la morale et du savoir. Oskar confirme:
«Oui. C’est par la filière du Québec que le Comecon avait exfiltré ses thèses pédagogiques débiles peu avant l’effondrement de l’URSS. Sachant le système condamné sous sa forme dure en URSS, ils ont exporté la forme soft vers l’Occident pour le pourrir de l’intérieur.
Eux, ils ont fini par se ressaisir grâce à Poutine; nous, nous nous sommes employés à nous déconstruire. Merci Derrida, Foucault et consorts…»
J’apporte une nuance à ce résumé. Les thèses pédagogiques débiles du Comecon étaient depuis longtemps réservées à l’exportation. Dès les années 1930, l’URSS était revenue à un système d’enseignement primaire, secondaire et supérieur classique et rigoureux qui s’est maintenu jusqu’à la Perestroïka. Les manuels de science soviétiques figurent parmi les meilleurs au monde et les humanités elles-mêmes, une fois décanté leur ballast marxiste, offrent un corpus de connaissances très solide. En revanche, les premières années de la révolution, celles de la NEP, ont été marquées par une expérimentation pédagogique débridée qui ressemble trait pour trait à l’école «socialisante», «inclusive», «égalitaire» de l’Occident du dernier demi-siècle. On en trouve une illustration saisissante dans le Journal de Kostia Riabtsev, semi-fiction parodique de Nikolaï Ogniov (1927) qui a très tôt sonné l’alarme sur ces dérives. C’est l’un des documents les plus originaux et les plus précieux sur le totalitarisme qu’aient traduits les éminentes éditions L’Age d’Homme.
Les Soviétiques avaient compris plus vite
A la différence des élites occidentales du XXIe siècle, les dirigeants bolcheviks ont su voir assez tôt le gouffre où les menaient ces expériences pédagogiques et sociétales. De là à les recycler comme armes de guerre pour intoxiquer l’ennemi via les organisations internationales, le stratagème était assez naturel pour ces joueurs d’échecs.
Et ceci est plus qu’une hypothèse de romancier, comme l’actualité nous le montre. Confronté en 2022 au premier conflit sérieux de son existence depuis 1945, l’«Occident collectif» s’est avéré d’une ineptie et d’une incompétence confinant à la détresse mentale. L’un des meilleurs commentateurs de la guerre actuelle, Andreï Martyanov, met la déficience intellectuelle des élites au-dessus de tous les problèmes industriels, technologiques ou militaires. Martyanov est citoyen américain, mais il a été formé à la dure école du génie militaire russe et a écrit plusieurs livres sur la guerre moderne. A la plupart des «décideurs» et des «analystes» américains et européens, il attribue un «QI ne dépassant pas la température ambiante». A quoi s’ajoute, selon lui, une ignorance crasse de l’histoire et de l’art militaire. Ces gens, le plus souvent dépourvus de formation scientifique solide, n’ont même pas les outils élémentaires de compréhension:
«On ne peut pas demander aux diplômés de l’Ivy League de savoir calculer. Le calcul, ils ne savent même pas ce que c’est.» Les universités, les fondations, la Rand Corporation, le New York Times, ou même l’Institut russe d’études américaines basé au Canada, souffrent tous selon Martyanov de la même déficience:
« Il leur manque l’outillage fondamental pour comprendre comment la géopolitique fonctionne pratiquement. La géopolitique repose sur l’équilibre de la puissance, or l’équilibre de la puissance requiert une connaissance fondamentale des questions militaires et technologiques… Ces gens vivent sur la propagande et le faux fabriqués par les think tanks américains. C’est une collection internationale d’ignares. Ils n’ont aucune idée.» Comme pour illustrer son propos, l’Institute for the Study of War nous livre cette semaine une explication rutilante de stupidité de l’échec de la contre-offensive ukrainienne. L’ISW n’a rien d’un institut ni ne s’occupe d’études, mais uniquement d’influence. C’est le porte-voix de la secte néocon qui dirige à Washington, et en tant que tel une voix «autorisée» du pouvoir occidental. Or voici comment l’ISW nous explique l’insuccès des Ukrainiens:
«Poutine a peut-être ordonné au commandement militaire russe de maintenir toutes les positions défensives initiales de la Russie pour créer l’illusion que les contre-offensives ukrainiennes n’ont eu aucun effet tactique ou opérationnel malgré le soutien substantiel de l’Occident.» En d’autres termes: si les Ukrainiens n’avancent pas, c’est parce que les Russes refusent de reculer! «Accroche-toi au pinceau, je retire l’échelle!» Voilà à quel niveau de raisonnement vous conduisent aujourd’hui les prestigieux diplômes de l’Ivy League.
L’effet papillon
On m’objectera peut-être un point de vue biaisé sur le sujet «Ukraine». Soit. Essayez d’observer d’un regard impartial la manière dont cette société raisonne face aux obstacles posés par le réel. C’est ce que fait, de manière assez truculente, le professeur Edward Dutton à l’enseigne du «Jovial hérétique» (The Jolly Heretic sur Substack et YouTube). En un exposé galopant de huit minutes, il explique ainsi l’impact de la baisse des capacités intellectuelles sur nos interactions avec les systèmes complexes que nous avons nous-même créés. A partir du cas d’une panne récente du réseau aérien causée par une erreur humaine, Dutton illustre la disruption prévisible de ces systèmes causée par l’écart entre leur sophistication croissante et la régression intellectuelle des humains censés les contrôler ou les entretenir. Le quotient intellectuel est une mesure certes très partielle de nos capacités de réflexion, mais le fait que ce quotient ait baissé de 15 points en un siècle et demie commence à avoir des conséquences indéniables. Lesquelles conséquences, selon Dutton, ne feront qu’empirer dans la mesure où l’idéologie dominante réprime les intelligents et promeut les idiots en comptant sur l’«intelligence artificielle» (autre stupidité) pour compenser leurs déficiences logiques et cognitives.
Or s’il n’y a plus suffisamment d’humains capables pour maintenir des systèmes de plus en plus subtils, ces systèmes tomberont en panne et il y aura encore moins d’intelligence disponible pour les réparer. On les abandonnera donc en faveur de solutions toujours plus rustiques.
Ce détour par les affaires civiles nous permet de mieux comprendre pourquoi, dans une société pourtant plus instruite et mieux informée que jamais, la débilocratie tient le haut du pavé, que ce soit dans les parlements, les états-majors ou sur les plateaux de télévision. Osera-t-on conclure que la flèche lancée il y a un plus d’un demi-siècle par les stratèges soviéto-chinois de la guerre culturelle ait si précisément atteint son but?
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Goebbels : »ce qui est juif nous en décidons ».
Trudeau : ce qui est nazi, etc.