Evolution récente du déficit commercial US vis à vis de la Chine

Par Dominique Delawarde

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Le déficit commercial US à l’égard de la Chine a toujours existé depuis que les échanges ont été
établis entre les deux pays. Il est intéressant de voir son évolution depuis 1990 (effondrement de
l’Union soviétique) et nos jours et plus particulièrement son évolution depuis le début de l’opération
spéciale russe en Ukraine.

Source: https://www.census.gov/foreign-trade/balance/c5700.html


Pour résumer et faire simple, en 1990 les échanges commerciaux entre les USA et la Chine
étaient encore très limités à 20 milliards de $ seulement. La Chine exportait alors pour 3 fois plus, en
dollars, vers les USA (15,2 milliards de $) qu’elle n’importait (4,8 milliards de $). Le déficit
commercial US vis à vis de la Chine était donc de 10,4 milliards de $ en 1990: une goutte d’eau…
Depuis cette date, les échanges se sont considérablement accrus, de manière continue et
déséquilibrée en faveur de la Chine, pour culminer à 659 milliards de $ en 2018. La Chine exportait
alors pour 538,5 milliards de $ de marchandises et n’en importait que pour 120,3 milliards de $ ( 4,5
fois moins). Le déficit commercial US 2018 avec la Chine était alors de 418,2 milliards, un record
jamais égalé, hérité par Trump des administrations précédentes et de la dynamique Obama.
Trump réussit à inverser la dynamique en 2019 et 2020 en réduisant ce déficit de plus d’un
quart en deux ans. Le déficit US avec la Chine a donc atteint un point bas à 308 milliards de $ en 2020.
Avec l’élection de Biden, le déficit US avec la Chine repart à la hausse en 2021 et 2022 pour
atteindre 382 milliards de $ en fin 2022. Biden a donc perdu en deux ans une large part de
l’amélioration gagnée par Trump en deux ans (2019 et 2020).
Mais depuis le début de l’année 2023, un changement très significatif peut être observé dans
la relation commerciale entre les USA et la Chine. Ce changement porte sur les exportations chinoise à
destination des USA et non sur les importations chinoises en provenance des USA.
Sur les 7 premiers mois de l’année 2023, les exportations chinoises sont passées à 239 milliards
de $, en baisse de 78 milliards de $ par rapport aux 7 premiers mois de l’année 2022. C’est une baisse
de 25% en une seule année. Cette baisse est inédite par son ampleur sur une aussi courte période
et dans toute la durée des relations commerciales USA-Chine, depuis la reconnaissance de la
Chine par les USA. Elle constitue probablement un effet collatéral de la guerre en Ukraine.

Par ailleurs, entre fin Janvier 2022 et fin juin 2023, période couvrant l’opération spéciale russe
en Ukraine et ses prémices, la Chine a remis sur les marchés financiers 200 milliards de $ de bons du
trésor US en passant de 1 034 milliards $ de créance US à 835 milliards de $. Elle a ainsi contribué, si
peu que ce soit, à l’entreprise de dédollarisation de la finance et du commerce international.


https://ticdata.treasury.gov/Publish/mfhhis01.txt et
https://ticdata.treasury.gov/resource-center/data-chart-center/tic/Documents/slt_table5.html


Bien entendu, ces bonds du trésor US ont été rachetés par les pays membres de l’OTAN qui ne
rechignent pas lorsqu’il s’agit de soutenir, voire de sauver leur dieu Dollar dont l’effondrement
précipiterait les leurs. Mais s’encombrer de créances de plus en plus douteuses lorsqu’on est, nous
même, très endettés, ne renforcera certainement pas nos économies européennes chancelantes.
La Chine, elle, prend progressivement mais nettement ses distances dans ses relations
commerciale, économique et financière avec les USA tout en redéployant son commerce et son
économie en direction des pays jugés plus amicaux et plus fiables, dont la Russie. Si la Chine a
baissé de 25% ses exportations vers les USA sur les 7 premiers mois de l’année 2023, elle a, sur la
même période, augmenté de 63% ses exportations vers la Russie que l’occident otanien cherchait à
isoler.

https://tass.com/economy/1670973 et https://tass.com/politics/1671777


Après avoir constaté le vol des avoirs russes par les USA et ses vassaux européens, après avoir
observé des comportements similaires de prédateurs sans foi ni loi, à l’égard des avoirs iraniens,
syriens, afghans, on comprend que la Chine souhaite limiter ses contacts avec le dollar, ceux qui le
plébiscitent, et l’extraterritorialité du droit US qui lui est attachée.
En désignant nommément la Chine comme un adversaire de l’OTAN dans le dernier concept
stratégique 2022, les responsables de l’occident otanien lui ont clairement fait comprendre qu’elle
n’aurait aucun répit tant qu’elle ne se soumettrait pas aux règles édictées par l’hégémon US.
La Chine en a tout naturellement tiré les conclusions. Mais plutôt que de précipiter l’économie
mondiale dans le chaos par une réaction brutale et précipitée, elle a choisi son camp, celui de la
multipolarité, et sa stratégie économique, la dédollarisation progressive de ses échanges commerciaux
et le redéploiement, progressif lui aussi, de son économie vers des partenaires plus fiables.
Cette stratégie aura, au fil du temps, un effet dévastateur sur les économies et les finances
occidentales: renchérissement des produits, inflation, paupérisation des populations, difficultés pour
continuer le fonctionnement à crédit des économies et des gouvernances occidentales sans la contribution
du camp de la multipolarité, déclassement des pays de cigales et montée en puissance des pays de fourmis.

Tout cela est devant nous. Jouer les autruches ou continuer à jouer les matamores sur la scène
internationale n’aura qu’un temps. Nos prétendues «élites», flambeurs et joueurs de poker, auront tenté
le coup de s’imposer au monde dans l’affaire ukrainienne, sans réaliser qu’ils n’en avaient plus les
moyens. Il était bien trop tard.
Ce sont donc les joueurs d’échec (Russes) et du jeu de Go (Chinois) qui vont l’emporter.
C’est une certitude. Nous ne pouvons que nous en prendre à nous même. Pourquoi ? Parce que nous
avons porté au pouvoir une élite incompétente et corrompue, incapable d’apprécier correctement une
situation, de raisonner avec bon sens et de faire preuve de pragmatisme. Et c’est cette élite que nous
avons élue qui nous a conduit dans l’impasse où nous sommes, en nous manipulant par des narratifs
délirants relayés par des médias serviles.
Faire la guerre pour tenter d’imposer l’ «ordre occidental» par la force ?
Encore faudrait-il avoir une toute petite chance de la gagner et que nos gouvernances cessent de
multiplier les erreurs d’appréciation qu’ils ont déjà commises au cours des cinq dernières années tant
dans leur «guerre à la Covid», que dans leur «guerre à la Russie» ou, plus récemment dans leur «guerre
au dérèglement climatique».
On ne gagne pas les guerres avec des populations en mauvaise santé et en surpoids, plus accrocs
au confort, au bien vivre et aux loisirs qu’à l’effort, au travail et aux valeurs;
On ne gagne pas les guerres avec, dans la tête, l’obsession du principe de précaution ou du
«zero defect philosophy». Il faut avoir de l’audace, de la détermination voire le goût du risque.
On ne gagne pas les guerres avec des populations qui ont une peur panique de la mort et de
l’éventualité de la souffrance : des populations qui préfèrent cesser de vivre en se confinant plutôt que
de courir le risque infime de mourir, en vivant normalement.
On ne gagne pas les guerres avec des populations de poissons rouges, qui gobent, sans réfléchir,
la moindre miette des narratifs politiques et médiatiques de propagande de leur pays et qui prennent
cela pour argent comptant; des gens qui ne savent qu’éructer leur haine au café du commerce, loin du
front des combats, prudence oblige, mais qui seraient bien incapables de mouiller leur chemise pour
joindre l’action à la parole sur un champ de bataille;
On ne gagne pas les guerres avec des gouvernances qui ont désinvesti pendant 30 ans sur leur
Défense en pensant que les guerres modernes se gagnaient par les sanctions économiques et qui
s’aperçoivent aujourd’hui, et bien trop tard, qu’elles se sont trompées.
On ne gagne pas les guerres avec des populations divisées et des Armées qui n’ont pas confiance
en leurs Chefs. Monsieur Biden ? Messieurs Macron, Sunak et Scholtz ? De quel degré de confiance de
leurs administrés peuvent-ils se prévaloir aujourd’hui ? De 15 à 30% peut être ? Et le reste ?
On ne gagne pas la guerre sur des causes douteuses qui ne font pas consensus pour une énorme
majorité voire l’unanimité de la réelle intelligentsia d’un pays.
On ne gagne pas la guerre avec des Armées sous équipées, aux effectifs squelettiques, sous
entraînées, sans réserves, avec quatre jours de munitions, opérant dans des régions lointaines, ce qui
ajoute aux difficultés logistiques et de maintenance, surtout lorsqu’on a affaire à des forces armées
aguerries par plus d’un an et demi de combat réels, bien équipées, soutenues par leur population,
combattant sur leurs terres et à proximité, et convaincues que leur cause est juste.
On ne gagne pas la guerre lorsque les économies sont chancelantes et déjà gangrenées par des
montagnes de dettes.

On pourrait continuer sur ce thème pendant des heures pour s’apercevoir in fine que l’occident
otanien n’est pas prêt à gagner une guerre classique de haute intensité avec la Russie, soutenue par de
nombreux pays, dans l’Est de l’Europe, si par malheur il s’engageait sur ce chemin. La « balance des
potentiels », utilisées par les militaires dans leur raisonnement tactique ou stratégique, n’est pas
aujourd’hui en notre faveur et aucun changement salvateur ne peut être attendu à court ou
moyen terme, bien au contraire.
Quant à une guerre nucléaire, elle est bien peu probable, car chacun sait, et l’ occident plus que
tout autre, qu’il y perdrait beaucoup en la déclenchant.

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